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10 ans sans nouvelles de David Fortin, sa famille garde espoir de le retrouver

MONTRÉAL — Le matin du 10 février 2009, peu avant huit heures, David Fortin demandait à sa mère Caroline Lachance d’aller le reconduire à l’école. Elle se rappelle lui avoir répondu qu’elle ne pouvait pas et qu’il n’a pas insisté. Vêtu de son chaud manteau de motoneige rouge, il a passé le seuil de la maison familiale à Alma et s’est dirigé vers l’arrêt d’autobus pour attendre le transport qui devait l’amener à l’école. Il n’a jamais été revu.

«J’ai entendu la porte se refermer et j’ai vu qu’il était parti. Je me suis passé la remarque qu’il partait cinq ou dix minutes plus tôt qu’à l’habitude, mais jamais je n’ai pensé que c’était la dernière fois que je voyais mon fils», confie Mme Lachance.

Cela fera exactement dix ans, dimanche prochain, qu’on a complètement perdu la trace de l’adolescent de 14 ans aux yeux et aux cheveux bruns, qui aurait aujourd’hui 24 ans.

Caroline Lachance et Éric Fortin n’ont jamais cessé de chercher leur fils aîné au cours de la dernière décennie. Depuis le tout début, la mère est convaincue que David a fui l’intimidation dont il était victime.

«Ça a toujours duré, depuis le primaire qu’il était victime d’intimidation, raconte-t-elle. David ne parlait pas, il ne parlait même plus de ce qu’il vivait à l’école.»

«Je savais que ça n’allait pas vraiment à l’école, mais de là à imaginer que je ne le reverrais plus, c’était loin de mes pensées.»

Un dossier toujours actif

Quand la nouvelle se répand que le garçon n’est ni monté dans l’autobus ni allé à l’école, le matin du 10 février 2009, les policiers déclenchent immédiatement leur enquête. Dès le départ, c’est Éric Gauthier au poste de la Sûreté du Québec à Alma qui prend le dossier en main.

La Presse canadienne a obtenu la confirmation que le dossier est toujours actif et demeure entre les mains de l’enquêteur Gauthier à qui il n’a pas été possible de parler.

«Il y a encore des informations qui rentrent et on vérifie ces informations, assure la sergente aux communications Mélanie Dumaresq. Même si elles ressemblent à quelque chose qu’on a déjà reçu.»

Dans le cas d’un dossier qui date, comme celui de David Fortin, on explique qu’une évaluation périodique est faite pour voir ce qui pourrait être tenté de nouveau parfois avec des moyens technologiques qui n’existaient pas à l’époque.

Elle ajoute que malgré les nouveaux dossiers qui arrivent chaque jour dans un poste de police, il ne faut pas croire que l’affaire non résolue est ensevelie en dessous de la pile.

«Les enquêteurs travaillent en équipe et ils ont du support. Il y a des policiers, mais aussi des employés civils qui font du travail d’analyse et de recherche», explique Mme Dumaresq.

Selon Claude Brodeur, un ex-enquêteur qui a cumulé 35 ans d’expérience, il ne reste plus grand-chose à faire dix ans après une disparition, mis à part espérer une information du public.

Ce qui peut toutefois encourager la famille, c’est que ce dossier ne sera jamais fermé. Chaque fois que les enquêteurs vont consulter la liste des affaires en cours, ils vont toujours se buter à cette disparition non résolue.

Des pistes qui ne mènent nulle part

Après sa disparition et les différents épisodes de médiatisation du dossier, plusieurs informations ont été communiquées aux enquêteurs.

«Il y a eu beaucoup d’informations qui n’étaient pas bonnes, mais il y a eu plusieurs personnes qui ont donné les mêmes informations, comme quoi il aurait été vu vers Métabetchouan et Lac-Bouchette en direction de Mékinac», relate la mère du garçon.

Bien que ces témoins ne connaissent pas David, Mme Lachance croit fortement que leur description correspond à son fils. «On ne pourra jamais être sûr à 100 pour cent», reconnaît-elle tout de même.

À son avis, la seule raison qui puisse expliquer la présence de David dans cette direction est un désir de «partir au gré du vent sans savoir où aller». Un moyen de descendre vers le sud par la route 155, vers la Mauricie.

Au fil des jours, des semaines et des mois qui ont suivi, de nombreuses informations ont été relayées aux policiers, mais elles ont toutes abouti à des culs-de-sac.

La sergente aux communications de la Sûreté du Québec, Mélanie Dumaresq, confirme que les informations reçues et vérifiées par les policiers se chiffrent en milliers.

«En dépit de toutes les initiatives et les milliers d’indices reçus, on est toujours sans nouvelles. On ne sait toujours pas ce qui s’est passé le matin du 9 février 2009. Ça demeure un mystère complet», se désole Pina Arcamone, directrice générale du Réseau Enfants-Retour.

L’espoir du 18e anniversaire

En juin 2012, l’espoir de revoir son fils était à son comble pour Caroline Lachance. Celle-ci croyait fermement qu’ayant atteint l’âge de la majorité, David donnerait signe de vie. Encore là, hélas, rien.

«Si David avait peur des policiers, il s’est peut-être dit que si je reviens avant 18 ans ils vont m’envoyer en foyer d’accueil et que si je reviens après 18 ans, ils ne pourront m’obliger à rien. C’est pour ça qu’on se disait, s’il se cache quelque part, il va peut-être revenir», partage la mère de famille, qui avait organisé une fête pour l’occasion.

Quatre ans plus tard, en 2016, le Réseau Enfants-Retour diffuse un portrait vieilli donnant un aperçu de quoi pourrait avoir l’air le jeune homme. Le visage de l’Almatois a une fois de plus fait le tour de la province, sans succès.

«Autant qu’on éclatait de joie quand une information entrait, autant on vit une très grande déception quand on apprend que ça ne mène nulle part. C’est arrivé souvent, mais toute information peut être bonne à donner», martèle encore aujourd’hui Mme Lachance.

Pas question de perdre espoir

«Ne pas savoir où il est, c’est la pire chose qu’on peut avoir à vivre», assure la mère de David. Malgré le temps qui passe, elle refuse de baisser les bras. «On ne peut pas perdre espoir, jamais», tranche-t-elle.

Pina Arcamone promet que son organisme ne baissera pas les bras non plus. «On doit permettre à une famille de cesser de chercher à un moment donné. On ne lâchera pas jusqu’à temps que ce jeune garçon, qui est un jeune homme aujourd’hui, n’aura pas été retrouvé.»

La diffusion récente d’une émission de télévision consacrée au cas de David Fortin aurait permis aux policiers d’obtenir encore des informations qui vont devoir être vérifiées.

«Parfois, une information qui semble anodine peut aider à donner une image plus claire de ce qui s’est passé», soutient Mélanie Dumaresq de la Sûreté du Québec. Elle demande aux gens de ne pas hésiter à partager tout détail lié à l’enquête.

Pour marquer le dixième anniversaire de la disparition, la famille Fortin-Lachance ne demande qu’une seule chose: que la photo de David soit vue «partout sur la planète».

«On ne va pas souligner l’événement parce que pour nous, pour souligner quelque chose, il faut que ce soit joyeux. Ce qu’on veut c’est que la planète sache que David n’a pas été retrouvé», implore Mme Lachance.

À quoi David Fortin ressemblerait-il aujourd’hui?

Au moment de sa disparition, le garçon mesurait cinq pieds et huit pouces. Comme les jeunes garçons de cet âge sont souvent en pleine croissance, il pourrait bien mesurer quelques pouces de plus aujourd’hui.

«David est sûrement un jeune homme de six pieds. Il était assez grand avec une bonne corpulence», croit sa mère.

Il y a trois ans, le Réseau Enfants-Retour a diffusé un portrait vieilli donnant un aperçu de quoi pourrait avoir l’air le jeune homme.

Ugo Giguère, La Presse canadienne



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