Connaître son métier sur le bout de ses doigts

PORTRAIT. Pierre St-Onge a au moins deux sens très développés: celui du toucher et celui de l’humour. Quand bien même il lui manquerait le sens de la vue, cela ne lui est pas nécessaire pour être un bon massothérapeute qui a le don de faire rire.

«Tu n’as pas besoin de voir pour masser», convient Pierre St-Onge qui, originaire de la Mauricie, travaille dans le domaine depuis 1990. Aveugle depuis l’âge de 13 ans des suites de cataractes congénitales, il n’a pas laissé son handicap avoir raison de ses ambitions. À l’école secondaire, au cégep, à l’université où, à l’époque, les aveugles étaient rares sinon absents dans les classes, il a dû développer des méthodes de travail alternatives.

«Il fallait ouvrir les portes partout dans un milieu qui n’était pas adapté», se rappelle-t-il au souvenir de ces cours qu’il enregistrait sur magnétophone pour ensuite retranscrire les notes à la maison. Ses études en génagogie – en quoi?? «(rires) en organisation fonctionnelle des groupes» – lui feront connaître une vie professionnelle active jusqu’à ce que, à 39 ans, il ait envie de ralentir la machine.

Centre de massothérapie de Québec… à Charlesbourg

«J’avais besoin d’un peu de repos. Je me suis cherché un métier que je pourrais faire. J’ai pensé à l’aviation, mais pas longtemps.» Autres rires. Après une formation d’un an, Pierre St-Onge inaugurera plutôt le Centre de massothérapie de Québec dans le sous-sol de sa résidence à Limoilou.

Ce ne sera pas long avant qu’il s’ennuie d’un mode de vie plus actif. Il commencera à donner des cours d’initiation aux loisirs de la Ville, bientôt suivis par des cours de niveau plus avancé pour répondre à la demande générale. De fil en aiguille, celui qui avait considéré la massothérapie comme sa préretraite ajoutera une école de formation à son centre.

En manque d’espace, Pierre St-Onge déménagera sa pratique à Charlesbourg à l’an 2000. «Je trouvais que ça faisait bizarre, de s’appeler le Centre de massothérapie de Québec et d’être à Charlesbourg, mais la fusion [des villes] est venue régler tout ça rapidement!», rigole le propriétaire de ce qui est devenu, en plus du volet formation, un centre de santé d’un jour avec une trentaine de services offerts. «On n’a pas d’hébergement par contre. Il y a des gens qui dorment ici, mais pendant les massages», lance-t-il, pince-sans-rire.

Le métier au bout des doigts

«C’est un beau métier pour les personnes aveugles, dira l’enseignant qui a formé d’autres handicapés visuels. C’est sûr que le sens du toucher est plus développé. Mais de là à dire que les aveugles sont de meilleurs massothérapeutes…», laisse-t-il planer en se gardant une réserve.

Pas de complexes!

Pierre St-Onge se souvient de sa première cliente, en octobre 1990. La surprise de celle-ci en découvrant qu’il était non-voyant, suivie d’une exclamation de soulagement à la perspective d’avoir affaire à quelqu’un qui ne la verrait pas en la massant. Une réaction décomplexée dont il est régulièrement témoin depuis 25 ans – ce qui ne le met pas à l’abri d’autres comportements motivés par des préjugés.

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