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L’étau alimentaire

Photo: Métro Média

Notre dette dépassera les 1 000 milliards de dollars. Il y a un an, plusieurs craignaient le pire en pensant que notre déficit pourrait dépasser les 24 milliards de dollars ! En quelques mois, nos repères ont complètement changé. Pendant que les gouvernements tentent de gérer la crise pandémique du mieux possible, l’incertitude persiste toujours. La deuxième vague s’avère particulièrement difficile pour tout le monde, même si un vaccin semble à la portée de tous.

L’énoncé de Chrystia Freeland, vice-première ministre et ministre des Finances du Canada, nous présentait une feuille de route parsemée de dépenses. Avec les déficits record qui s’alignent sur plusieurs années, nous ne savons toujours pas comment le gouvernement fédéral paiera pour tout cela. Difficile de blâmer le gouvernement pour les dépenses encourues jusqu’à maintenant, une pandémie n’a rien d’ordinaire, mais le legs fiscal préoccupe.

«La mise à jour économique d’Ottawa fait peur, surtout pour notre sécurité alimentaire. Avec le panier d’épicerie qui coûte plus cher et un fardeau fiscal qui risque d’augmenter ces prochaines années, la plupart d’entre nous ressentent l’effet de l’étau qui se resserre.»

Avec cette mise à jour, nous avons appris que le gouvernement entend imposer une taxe sur certains services numériques étrangers comme Netflix et des services en ligne offerts par des entreprises comme Amazon. Pas surprenant, on s’y attendait. Cependant, Ottawa a fourni peu de détails sur la façon dont les contribuables seront affectés par des dépenses qui font littéralement peur.

Avec l’année qui s’achève, plusieurs se préoccupent toujours des prix alimentaires plus élevés ces jours-ci. Ces prix ont augmenté d’environ 3 % en 2020. Malgré un taux d’inflation générale stagnant, le taux d’inflation alimentaire est nettement plus élevé depuis les dix dernières années. De toute évidence, l’année 2021 suivra cette tendance. Autrement dit, la portion de notre budget consacrée à l’alimentation augmente sans cesse. Nous nous attendons encore à une autre année particulièrement difficile.

Pour plusieurs, les choses se compliqueront au printemps prochain. Au-delà de huit millions de Canadiens réaliseront qu’ils devront payer de l’impôt sur les prestations canadiennes d’urgence perçues en 2020. Et avec un taux d’endettement qui a recommencé à monter, fort probablement qu’un nombre plus important de ménages éprouveront des difficultés financières au cours des prochains mois.

Plus préoccupant encore, c’est l’étau fiscal qui se resserre sur plusieurs d’entre nous. Le ménage moyen consacre environ 10,2 % de son budget disponible sur l’alimentation. Le pourcentage varie selon les régions et les classes socio-économiques, bien sûr. Inévitablement, le revenu disponible moyen diminuera en raison de pressions fiscales accrues. Et avec des prix alimentaires en hausse, la pression viendra des deux côtés. Un scénario terrifiant, surtout pour les citoyens de la classe moyenne. Forcément, le ménage moyen pourrait consacrer de 12 à 13 % de son budget à l’alimentation d’ici les prochains mois, peut-être même davantage.

Bref, augmenter le fardeau fiscal des Canadiens devient inévitable, tant au niveau fédéral, provincial que municipal. Avec des gouvernements motivés d’augmenter les revenus publics, la tentation de taxer certains produits alimentaires sera plus vive que jamais. De manière concrète, comme certains rapports suggèrent que la consommation d’alcool a augmenté depuis le début de la pandémie, il y a fort à parier que les bières, vins et autres boissons alcoolisées se retrouvent dans la mire des taxateurs.

Certains produits comme les boissons gazeuses et autres aliments à haute teneur en sucre pourraient aussi s’ajouter sur la liste. Taxer de la nourriture, constitue toujours une mesure dangereuse. Non seulement peu de gens savent ce que les gouvernements font réellement avec les sommes supplémentaires récoltées, mais les répercussions socio-économiques de telles politiques à travers le monde sont rarement claires et ont souvent présenté des résultats déroutants. Mais la tentation reste réelle ici au Canada, ne vous faites pas d’illusion !

En somme, avec un panier d’épicerie qui coûte plus cher, l’étau fiscal se transformera certes en un étau alimentaire pour plusieurs. Un changement socio-économique important nécessite une gestion très prudente et beaucoup de doigté.

 

Dr. Sylvain Charlebois, professeur titulaire, directeur principal, Laboratoire de sciences analytiques en agroalimentaire, Université Dalhousie

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