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Un bloc d’anciens députés exhorte Martine Ouellet à démissionner

Martine Ouellet ne peut s’accrocher au pouvoir après avoir perdu la majorité de son caucus, estime un groupe d’ex-députés, reprochant au passage à la chef contestée son approche «incantatoire» de la promotion de l’indépendance.

La chef du Bloc québécois, Martine Ouellet.

Jacques Boissinot / La Presse Canadienne

L’ancien chef de la formation Gilles Duceppe et une multitude d’ex-élus bloquistes sont sans appel dans la cinglante lettre ouverte qu’ils signent dans Le Devoir: la leader n’a plus la légitimité d’occuper le poste de chef des députés indépendantistes à Ottawa.

«Par son côté clivant, Martine Ouellet affaiblit la voix du Québec à Ottawa au moment même où il a besoin d’une voix forte. Elle divise les souverainistes au moment où ils ont besoin de s’unir. Elle doit partir», tranche le groupe d’ex-députés indépendantistes.

Ils disent comprendre «tout à fait» les sept députés qui ont claqué la porte un peu plus tôt cette semaine, car «l’intransigeance» de Martine Ouellet «n’a fait qu’exacerber» les «conflits internes au Bloc», se désolent-ils.

Au passage, les signataires de la lettre démolissent la façon dont la frange Ouellet dit vouloir faire la promotion de l’indépendance du Québec. Celle-ci, écrivent-ils, relève de l’«incantation» plutôt que de la nécessaire «démonstration» de l’importance de défendre les intérêts québécois.

«L’incantation, qui consiste à répéter le mot « indépendance » le plus souvent possible, plaît à plusieurs militants. En parlant ainsi aux convaincus, on peut gagner des investitures locales ou des courses à la chefferie. Mais cela s’arrête là», exposent-ils.

La «démonstration», stratégie qui était préconisée sous les anciens chefs et qui «demande d’y aller dossier par dossier, de cerner clairement les intérêts du Québec», est «encore celle qui est la plus prometteuse» pour réaliser l’indépendance du Québec, tranchent les anciens élus.

«Vieilles recettes»

Lors de son discours au Conseil national du Bloc québécois, il y a quelques semaines, Martine Ouellet avait déclaré qu’elle sentait de la «résistance» au sein de son parti, qui selon elle devrait arrêter d’adopter les «mêmes recettes qui sont là depuis 25 ans».

Selon l’ancien député Marc Lemay, qui a signé la lettre, c’est Mme Ouellet qui fait la promotion des vieilles recettes, et, dit-il, elle pourrait en payer le prix aux prochaines élections.

«Selon moi, elle n’a aucune chance de remporter dix comtés au Québec, oubliez ça!», a-t-il lancé au bout du fil.

«Elle peut rester là, mais elle n’aura plus aucune crédibilité pour défendre les intérêts du Québec à Ottawa. Dans l’intérêt du Bloc québécois, elle devrait quitter.»

Pierre Paquette, un ancien député du Bloc québécois qui est aussi signataire de la lettre, espère que la pression qu’elle subira dans les prochains jours amènera Mme Ouellet à reconsidérer sa décision de rester à la tête du parti.

«Je pense qu’elle doit prendre en compte le fait que l’unité du mouvement souverainiste, la survie du Bloc québécois, doit passer avant sa personne», a-t-il plaidé en entrevue téléphonique.

Le député Gabriel Ste-Marie, qui siège maintenant avec ses collègues démissionnaires au sein du «Groupe parlementaire québécois» à la Chambre des communes, a confirmé vendredi qu’il était de l’école de pensée des anciens députés.

«Pour nous, c’est vraiment au niveau de la démonstration. C’est ça notre rôle ici: porter les consensus du Québec. (…) Ce qu’on a à faire comme travail ici est bien écrit dans la lettre», a-t-il offert en mêlée de presse, vendredi.

Car cette «recette» dont parlent la vingtaine de signataires de la lettre ouverte, «des grands sages, des gens d’expérience» qui ont «siégé longtemps ici», a été «gagnante», a exposé le député Ste-Marie.

Une autre démissionnaire, Monique Pauzé, a pour sa part souligné que les propos contenus dans cette lettre l’avaient «confortée» dans sa décision, et que même si cette décision n’avait pas été facile à prendre, elle se sentait aujourd’hui «très sereine».

L’élue a formulé le souhait que la lettre contribuerait à la réflexion de Martine Ouellet.

«J’espère qu’elle va mener une bonne réflexion, de voir dans le fond que ces gens-là — qui ont l’expérience d’Ottawa, et Mme Ouellet n’a pas l’expérience d’Ottawa —, ils témoignent de ça. J’espère que ça va l’aider à réfléchir et à prendre des décisions», a-t-elle soutenu.

Les sept députés démissionnaires signeront d’ailleurs une lettre ouverte qui sera publiée dans les journaux samedi matin.

Demandes de démission

La démission de la chef a aussi été réclamée par les conseils exécutifs de deux circonscriptions, vendredi. Celui de Berthier—Maskinongé juge que la situation est «intenable» et que le maintien en place de Mme Ouellet «ne pourra que nuire à la cause de l’indépendance».

Du côté de Portneuf—Jacques-Cartier, on exhorte Mme Ouellet à faire passer «avant toute chose le bien supérieur du mouvement indépendantiste». On réclame aussi la nomination d’un chef intérimaire et la réintégration du groupe des sept au sein du caucus bloquiste.

La principale intéressée a choisi de ne pas répondre à ces nouvelles frondes dans l’immédiat, a-t-on indiqué vendredi. L’attaché de presse de l’aile parlementaire du Bloc québécois, Antoni Gilbert, a toutefois tenu à préciser que la chef ne démissionnerait pas et qu’elle gardait son ouverture envers les autres députés, malgré ces nouvelles attaques.

Il est cependant prévu que Mme Ouellet s’adresse aux médias samedi, alors que le bureau national du Bloc québécois se réunira à Montréal.

 

Mélanie Marquis et Vicky Fragasso-Marquis, La Presse canadienne

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