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Le débat constitutionnel reprend sa place à l’Assemblée nationale

QUÉBEC. Le Parti québécois (PQ) met au défi le premier ministre Philippe Couillard de livrer des progrès tangibles sur le plan constitutionnel d’ici aux prochaines élections en 2018.

Le premier ministre du Québec, Philippe Couillard.

La Presse canadienne – Jacques Boissinot

Le premier ministre a présenté en grande pompe jeudi sa toute première politique d’affirmation du Québec et des relations canadiennes, intitulée «Québécois, c’est notre façon d’être Canadiens».

Elle propose essentiellement d’ouvrir le dialogue avec tous les Canadiens afin de créer les conditions favorables à la reprise d’éventuelles négociations constitutionnelles.

Si dans un an les Canadiens-anglais sont toujours réfractaires à reconnaître la nation québécoise dans la Constitution, la politique du premier ministre sera rien de moins qu’un «échec», a déclaré le chef du PQ, Jean-François Lisée. «Il s’est mis sur les épaules le fardeau de la preuve, et on pense que c’est sain pour lui et pour ceux qui croient encore à ce pays imaginaire que serait un Canada respectueux de la différence québécoise, qu’il y aille, qu’il change l’opinion canadienne, et on lui donne à peu près un an jusqu’à l’élection pour qu’il montre des progrès», a-t-il dit. 

Le chef du PQ a affirmé que le «printemps de la discussion» commençait bien mal, car la «main tendue» de M. Couillard «avait eu comme réponse une gifle, du mépris, de la désinvolture» de la part du premier ministre Justin Trudeau. «Aujourd’hui, le premier ministre a décidé de sortir en grande pompe la carte de l’espoir. Nous, on pense que ça va être un espoir déçu», a-t-il dit, en ajoutant que l’opinion canadienne était probablement plus disposée à donner une place aux Autochtones qu’aux Québécois.

La Coalition avenir Québec (CAQ) a quant à elle critiqué la «timidité» de la proposition Couillard et son manque d’objectifs à court terme. «C’est toujours bon de dialoguer, mais (…) il faut que vous demandiez des choses», a déclaré le député caquiste Simon Jolin-Barrette.

La Nation québécoise

«Nous formons une nation et la conscience que nous avons d’être une nation est antérieure à 1867», avait déclaré M. Couillard plus tôt en Chambre.

Le débat constitutionnel a ainsi repris sa place à l’Assemblée nationale jeudi matin après une longue absence. En ce 150e anniversaire de la Confédération, le gouvernement Couillard veut en effet relancer les pourparlers, selon un document de 200 pages obtenu par La Presse canadienne avant sa diffusion jeudi après-midi.

Questionné à ce propos par M. Lisée, le premier ministre a tenu à inscrire la démarche de son gouvernement dans l’Histoire et à justifier aux Québécois la relance du dialogue. Il a rappelé avec un air de solennité qu’une communauté spécifique de langue française existait bien avant 1867. «Je dis aux Québécois aujourd’hui qu’avec ce document nous faisons une déclaration d’affirmation du peuple québécois et voulons enclencher une démarche», a-t-il affirmé.  «C’est que nous formons une nation et que la conscience que nous avons d’être une nation, en fait, est antérieure à 1867. Tous les événements de types gouvernementaux ou quasi constitutionnels qui se sont déroulés après la conquête britannique de 1759 ont eu, comme point central, l’existence d’une communauté spécifique différente de langue française en Amérique du Nord. Donc, ça existait avant la fédération canadienne.»

S’adressant à l’opposition, il a dit espérer que sur un sujet semblable «nous serons capables de faire l’unité ici, dans cette Chambre», sauf évidemment sur l’objectif ultime de l’avenir constitutionnel du Québec.

En conférence de presse en matinée, M. Lisée a tenu à féliciter pour une rare fois le premier ministre Philippe Couillard parce qu’il aborde ainsi le «problème structurel de la fédération» en voulant relancer le débat constitutionnel. «C’est le retour à la lucidité» du Parti libéral, a-t-il déclaré, après des années d’aveuglement et d’échecs dans les doléances auprès d’Ottawa, que ce soit sur les transferts fédéraux en santé, la Banque fédérale d’infrastructures, la nomination des juges à la Cour supérieure, l’aide à Bombardier, etc.

Et comme le gouvernement Couillard reconnaît dans son document qu’il faut poser un geste pour que «les Québécois ne se (sentent) plus exilés au sein de leur propre pays», le chef péquiste a dit qu’il partage au moins ce constat, soit de dire «à tous les Québécois et à tous les fédéralistes: le Canada est brisé et vous êtes des exilés dans votre propre pays tant que ce n’est pas réparé. Ça, c’est important».

Rappelons que le document «Québécois, notre façon d’être Canadiens _ Politique d’affirmation du Québec et de relations canadiennes» préconise que le Québec occupe toutes les tribunes au pays pour reprendre le dialogue et faire accepter ses revendications traditionnelles, jusqu’à leur enchâssement dans la Constitution, une condition pour que le Québec redevienne membre de la fédération canadienne.

Le gouvernement y reprend également à son compte toutes les revendications traditionnelles du Québec et s’approprie, en les actualisant, les fameuses cinq conditions préalables fixées par le gouvernement de Robert Bourassa en 1986: la reconnaissance du Québec comme société distincte, des limites au pouvoir fédéral de dépenser, une garantie d’une représentation québécoise à la Cour suprême, un droit de veto sur les modifications constitutionnelles et des pouvoirs accrus en matière d’immigration.

Patrice Bergeron et Caroline Plante, La Presse canadienne

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