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Le harcèlement sexuel est désigné «Nouvelle de l’année» par les médias canadiens

L’histoire a commencé au début du mois d’octobre par des allégations de harcèlement sexuel visant un tout-puissant producteur américain, jusque-là intouchable au sommet des collines de Hollywood, mais peu connu du grand public. Puis, un raz-de-marée d’accusations d’inconduites sexuelles a emporté des vedettes adulées de par le monde, sans compter quelques personnalités québécoises.

Manager putting his hand on the shoulder of his secretary, at the office

(Photo – Deposit Photos)

Un mot-clic, #moiaussi, a vu le jour dans les médias sociaux pour canaliser des dénonciations qui n’attendaient, semble-t-il, que le bon moment pour déferler contre des personnalités qui se croyaient pourtant à l’abri, du haut de leur statut. C’est pourtant ce statut qui aura alimenté la déferlante.

L’automne a été marqué par l’ouverture de cette formidable «conversation» sur le harcèlement, les agressions et autres inconduites sexuelles. C’est cet enjeu qui a été désigné par une majorité de rédactions des médias du pays comme la «Nouvelle qui a marqué l’actualité de 2017».

Dans le sondage annuel mené par La Presse canadienne auprès de ses clients, près de 30 pour cent des répondants ont choisi le harcèlement sexuel. En deuxième place, mais pas très loin, à 22,5 pour cent, les médias canadiens ont choisi la crise du fentanyl, qui fait des ravages dans certaines régions du pays.

Mais dans les rédactions des médias francophones, qui ont débusqué Gilbert Rozon et autres Éric Salvail, l’enjeu du harcèlement sexuel a fait l’unanimité des répondants au sondage.

Gilles Carignan, rédacteur en chef au quotidien «Le Soleil» de Québec, a estimé qu’il s’agissait «ni plus ni moins que le début d’une petite révolution sociale». Patrice Gaudreault, son collègue au «Droit» d’Ottawa, croit lui aussi que «cette nouvelle continuera d’occuper une grande place dans l’actualité en 2018».

Marc Gendron, directeur de l’information à «La Voix de l’Est», de Granby, estime qu’«au-delà de la nouvelle, il s’agit d’un phénomène social sans précédent».

«La vague de dénonciations a déferlé partout dans le monde. Reste à voir si elle aura un impact durable sur les comportements sociaux», conclut-il.

Sinistre effet domino

Harvey Weinstein, magnat de Hollywood, fait face à de multiples allégations de harcèlement, voire d’agressions sexuelles d’actrices, aux États-Unis et à l’étranger, notamment à Toronto. Par un sinistre effet domino, de grandes vedettes, jusque-là respectées, ont vu leur réputation entachée: Kevin Spacey, Louis C.K., Dustin Hoffman, Jeffrey Tambor, Matt Lauer, James Levine, Charlie Rose, Al Franken, voire l’ancien président George H.W. Bush… Le mur de la honte semble illimité.

Au Québec, le grand patron du Festival Juste pour rire, Gilbert Rozon, a dû quitter l’empire qu’il avait fondé à cause de semblables allégations, dévoilées par des femmes qui ont soudainement et solidairement décidé de briser le silence, parfois après des années de discrètes souffrances.

Gilbert Rozon est certes moins connu au Canada anglais, mais un analyste de baseball au réseau Sportsnet, Greg Zaun, a été congédié lorsque des collègues féminines l’ont accusé d’avoir multiplié les grossièretés à caractère sexuel en milieu de travail. Et l’effet Weinstein a aussi fait son oeuvre dans «l’autre solitude».

Darren Krause, rédacteur en chef du journal «Métro» à Calgary, croit même que cet enjeu pourrait devenir la «nouvelle de la décennie».

Joshua Freeman, journaliste web à la station de télévision CP24, de Toronto, croit que cet enjeu touche le coeur même des relations hommes-femmes au quotidien. Il estime que cette révolution soulève des questions sur les progrès soi-disant accomplis en matière de lutte contre le sexisme et les comportements inappropriés en milieu de travail, «et sur notre capacité à gérer avec maturité nos pulsions sexuelles».

Paulette Senior, présidente de la Fondation canadienne des femmes, estime que cette vague de dénonciations a permis aux victimes d’être davantage crues lorsqu’elles décident de briser le silence. «Que ce soit par le biais du mouvement #moiaussi au Canada ou aux États-Unis, on a assisté à un raz-de-marée sans précédent de dénonciations de femmes qui se sont senties habilitées à parler.»

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Voici les résultats complets du sondage mené par La Presse canadienne auprès des rédactions des clients de l’agence de presse nationale sur la «Nouvelle qui a marqué l’actualité de 2017»:

— Harcèlement sexuel: 28,75 pour cent

— Crise du fentanyl: 22 pour cent

— Légalisation de la marijuana: 17 pour cent

— Incendies de forêt en Colombie-Britannique: 8,75 pour cent

— Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées: 6,25 pour cent

— Demandeurs d’asile à la frontière canado-américaine: 6,25 pour cent

— Indemnité offerte à Omar Khadr: 5,0 pour cent

— Renégociation de l’ALÉNA: 2,5 pour cent

— Attentat à la mosquée de Québec: 1,25 pour cent (un vote)

— 150e anniversaire de la fédération canadienne: 1,25 pour cent (un vote).

La Presse canadienne

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