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Marijuana: le gouvernement Couillard déçu du manque de financement

Le Québec s’est dit déçu, jeudi, de la proposition du gouvernement fédéral de légaliser la marijuana, car elle ne serait pas assortie d’un soutien financier adéquat pour les provinces. 

Ottawa a budgété 9,6 millions $ sur cinq ans pour informer les jeunes Canadiens et leurs parents des risques de consommer du cannabis.

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La ministre responsable de la Santé publique, Lucie Charlebois, a avancé en point de presse à Québec que les sommes déjà mises de côté par Ottawa pour la prévention et les soins en santé mentale étaient «risibles».

Ottawa a budgété 9,6 millions $ sur cinq ans pour informer les jeunes Canadiens et leurs parents des risques de consommer du cannabis. 

Cinq milliards de dollars sur dix ans seront aussi transférés aux provinces et aux territoires afin d’améliorer l’accès aux services de santé mentale.

«Ça n’a rien à voir, là, on a besoin d’argent supplémentaire pour faire de la prévention, pour outiller les parents», a réagi Mme Charlebois. 

«Comment on va faire pour faire de la pédagogie? Comment on va faire pour préparer les parents, pour faire de la sensibilisation dans les écoles? Ça ne viendra pas du ciel. Pour former les policiers, ça va prendre une formation supplémentaire. Ça va nous prendre aussi des nouvelles mesures en sécurité routière. Bien, ça va coûter de l’argent, tout ça. (…) Pour le système de justice, il y a un impact énorme, énorme, énorme, quant à la formation, quant aux disponibilités des salles de cour, etc. Ce projet de loi là vient changer beaucoup de choses.»

Un comité interministériel à Québec, en plus du comité Québec-Ontario, passera les prochains mois à étudier les questions de santé et de sécurité liées à la légalisation du cannabis. Cela permettra ensuite au gouvernement Couillard de présenter sa propre loi cadre.

Mais tout le travail effectué sur la question du cannabis fera de «l’interférence» à Québec, a dit Mme Charlebois. Pendant que des équipes se demanderont comment distribuer la marijuana, où et à quel âge, en plus d’étudier les questions de prix et de taxation, d’autres dossiers, eux, resteront en plan, a-t-elle dit. 

«Le temps qu’on met là-dessus, bien, il ne sera pas sur d’autres projets de loi», a-t-elle ajouté.

Les Québécois sont inquiets, selon le PQ

La légalisation prochaine de la marijuana exige la tenue d’une vaste consultation publique à travers le Québec, selon l’opposition péquiste.

«Les pères et les mères de famille que nous sommes, nous vivons exactement les mêmes inquiétudes que la population nous confie dans nos bureaux de circonscription, nous envoie comme courriels, comme téléphones», a indiqué le porte-parole du Parti québécois en matière de santé publique, Sylvain Pagé. 

«La population est inquiète. Pourquoi? Parce que ce débat de société n’a pas eu lieu.»

Plusieurs questions sans réponses

De son côté, la Coalition avenir Québec a prévenu que la culture à domicile serait difficile à contrôler.

En vertu du projet de loi fédéral, les Canadiens pourront avoir jusqu’à 30 grammes de marijuana en leur possession et ils pourront faire pousser jusqu’à quatre plants chez eux. Les plants ne pourront pas dépasser un mètre de hauteur. Et la quantité de plants — quatre — est par logement, non par personne.

«Est-ce que ça inclut également les chalets, les résidences secondaires, les immeubles à revenu?» a réagi le député caquiste Simon Jolin-Barrette.

«Qu’est-ce que ça veut dire ça? On va dire à l’inspecteur municipal: ‘Allez dans les résidences des gens pour vérifier combien de plants de pot sont cultivés?’»

Selon le projet de loi du gouvernement Trudeau, il sera légal de fumer de la marijuana au Canada à partir de l’âge de 18 ans.

Les provinces pourront changer l’âge minimum légal, mais seulement si elles le haussent.

Les adultes canadiens pourront acheter du cannabis séché ou frais et de l’huile de cannabis d’un détaillant dont le commerce sera soumis à des règles provinciales.

Dans les provinces où la vente au détail ne serait pas organisée, les Canadiens pourraient acheter le produit en ligne, auprès d’un producteur autorisé par Ottawa. Le cannabis leur serait alors posté dans une livraison sécurisée.

Il demeurera illégal d’exporter du cannabis au-delà des frontières canadiennes.

Le projet de loi prévoit également des tests de dépistage salivaire des drogues afin que les policiers puissent vérifier l’état des automobilistes. La conduite avec facultés affaiblies par la drogue demeure illégale.

Ce qu’ils ont dit…

«Il faut que tout le monde se parle (…) pour que par la suite moi, comme maire et président de la Communauté métropolitaine de Montréal, ou au niveau de l’Union des municipalités du Québec, qu’on puisse s’asseoir avec les ministres (…) parce que c’est une question de santé publique. Qu’est-ce que ça veut dire concrètement? Est-ce qu’il y a des montants, des ressources qui sont distribués? Est-ce qu’il va y avoir des redevances?»

Denis Coderre, maire de Montréal

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«Il est important, tant pour la sécurité que la santé publique, que des règles claires régissent cette nouvelle réalité. Nous veillerons au grain pour contribuer au meilleur encadrement juridique possible et au respect de la primauté du droit.»

Me Claudia P. Prémont, bâtonnière du Québec  

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«Il est urgent que le gouvernement du Québec, et plus particulièrement le ministère de la Santé et des Services sociaux, mette en place un forum de discussion et de concertation réunissant les experts et les organismes en soutien à l’intervention, afin de se préparer adéquatement à l’adoption de ce projet de loi.»

Lisa Massicotte, de l’Association des intervenants en dépendance du Québec (AIDQ)

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«Le cannabis n’est pas un produit comme les autres. Il y a bien entendu des considérations de santé publique, mais il faut également s’assurer que le marché noir disparaisse pour de bon. Seule une société d’État dont les objectifs sociaux comme financiers sont définis par le gouvernement est en mesure de concilier la nécessité de répondre à la demande des consommateurs tout en assurant le respect le plus strict des normes et l’encadrement qui sera souhaité par le gouvernement.»

Alexandre Joly, président du Syndicat des employé(es) de magasins et de bureaux de la SAQ (SEMB-SAQ)

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Les directeurs de santé publique du Québec sont unanimement en faveur d’une loi qui encadrerait la légalisation du cannabis dans la mesure où un cadre réglementaire complet serait élaboré avant l’entrée en vigueur de la loi. Ces derniers présentent, dans un mémoire, leur position basée sur une approche de santé publique.

À leur avis, une approche globale de santé publique vise à:

– prévenir ou retarder l’initiation de l’usage chez les non-consommateurs, particulièrement chez les jeunes;

– favoriser un usage sécuritaire chez les consommateurs à des fins non médicales en évitant les risques d’abus et de dépendance;

– offrir des services aux personnes présentant une consommation problématique.

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Les trois quarts des propriétaires d’immeubles de logements (CORPIQ) s’inquiètent face à une éventuelle légalisation du cannabis à des fins récréatives et, dans une proportion encore plus élevée, ils ne font pas confiance aux autorités pour faire respecter par les locataires une norme permettant d’en cultiver.

«Même si les propriétaires conservent le droit dans leurs baux d’interdire aux locataires de fumer, faire respecter cette interdiction n’est déjà pas facile. À cela s’ajouterait le contrôle des plantations et le risque qu’il y ait dans l’immeuble du commerce de marijuana.» 

Hans Brouillette, directeur des affaires publiques de la CORPIQ

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