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Commission Chamberland: un journaliste du Journal de Québec a été surveillé par la SQ

SURVEILLANCE. Un autre journaliste a été l’objet de surveillance de la part de la Sûreté du Québec, a-t-on appris lundi à la Commission Chamberland sur les sources journalistiques. Il s’agit de Nicolas Saillant, du Journal de Québec. Et celui-ci l’ignorait jusqu’à maintenant.

Sûreté du Québec

Photo: TC Media-Sabrina Malaison

Nicolas Saillant, journaliste au Journal de Québec

(Photo tirée Facebook)

C’est le directeur général de la Sûreté du Québec, Martin Prud’homme, qui l’a révélé lorsqu’il était contre-interrogé par Me Christian Leblanc, un avocat qui représente plusieurs médias.

On a aussi pu savoir que cette surveillance remontait à 2012. Le contexte n’a pas été révélé, non plus que les motifs au soutien de la requête policière pour surveiller ce journaliste.

Jusqu’ici, la commission a surtout parlé de l’opération Diligence. Celle-ci se rapporte à l’écoute électronique de l’ancien président de la FTQ, Michel Arsenault, qui s’en était plaint au ministre de la Sécurité publique de l’époque, Stéphane Bergeron.

Comme il y avait eu des fuites dans les médias concernant cette écoute, il y avait eu enquête à la SQ concernant la provenance de ces fuites.

Le nom de M. Saillant s’ajoute ainsi à ceux d’Isabelle Richer, Marie-Maude Denis et Alain Gravel, de Radio-Canada, Éric Thibault, du Journal de Montréal, ainsi que Denis Lessard et André Cédilot, de La Presse, dans le cas de la SQ.

M. Prud’homme a soutenu l’avoir appris lui-même le 20 décembre dernier et en avoir informé une sous-ministre le 21.

La Commission Chamberland attend encore que la SQ lui fournisse la documentation à ce sujet, a indiqué aux médias l’avocat en chef adjoint de la commission, Me Charles Levasseur, à la fin de la journée.

Et en début de soirée, le porte-parole de la SQ, Guy Lapointe, a fait savoir que le service de police avait tout simplement procédé par ordre de priorité, dans la masse des documents demandés par la commission, et que ce dossier n’avait pas été jugé prioritaire.

Il devait être abordé lorsque la commission s’attardera à la preuve factuelle, aux événements précis.

Pas de procédure particulière

Par ailleurs, André Goulet, inspecteur-chef et directeur des enquêtes criminelles à la SQ, a aussi admis qu’il n’y avait aucune procédure particulière en place à la Sûreté du Québec lorsqu’une enquête concernait un journaliste, jusqu’à novembre dernier.

Le directeur général Prud’homme a affirmé que c’est lui qui a pris l’initiative d’écrire une note à ce sujet, le 1er novembre 2016. Une directive a suivi le 4 novembre pour que les personnes intéressées soient avisées des règles en matière de surveillance de journalistes.

«Je crois en la liberté de presse», a lancé le d.g. de la SQ, affirmant qu’il comprenait pourquoi les journalistes avaient besoin de préserver la confidentialité de leurs sources pour obtenir certaines informations.

La note du d.g. de la SQ interdisait «toute enquête, surveillance ou vérification concernant un journaliste si elle n’a pas été autorisée par un membre de l’état-major au préalable», a rapporté l’inspecteur-chef Goulet.

La directive précise aussi que «toute demande d’autorisation judiciaire visant l’obtention de mandat de surveillance à l’endroit d’un journaliste ou d’un membre de la presse doit être soumise au Directeur des poursuites criminelles et pénales pour analyse avant que celle-ci soit présentée à un juge de paix».

Il en va de même pour la surveillance des avocats, juges et députés.

Le fait que la SQ n’ait disposé d’aucune procédure particulière lorsqu’une enquête touchait un journaliste peut paraître surprenant, d’autant plus que la Cour suprême du Canada avait déjà confirmé l’importance de la confidentialité des sources journalistiques.

Grande prudence

De son côté, M. Prud’homme a indiqué que la Sûreté du Québec doit faire preuve d’une «grande prudence» si elle échange des informations avec le ministère de la Sécurité publique.

«Je ne peux pas transmettre une information que je ne dois pas transmettre à un ministre et positionner ce ministre-là dans une mauvaise situation de posséder une information qu’il ne devrait pas avoir. Alors il y a une grande, grande prudence sur l’information qui est échangée», a-t-il affirmé.

Me Levasseur lui a demandé si un ministre de la Sécurité publique pouvait s’enquérir du «volet opérationnel» d’une enquête en demandant des informations précises à la SQ.

«Non. J’aimerais préciser qu’au fil des années que moi j’ai occupé ces fonctions-là, depuis 2009, je n’ai jamais eu à vivre cette expérience-là. Peu importe, j’ai travaillé avec six ministres jusqu’à présent; j’ai travaillé avec différents gouvernements. Et ce n’est pas une question que jamais j’ai eu à débattre. Je dirais même: au contraire», a affirmé le d.g. de la SQ.

M. Prud’homme a aussi noté que s’il décide de faire part de certaines informations au ministère, il doit s’adresser au sous-ministre à la Sécurité publique ou au sous-ministre associé, et non au ministre lui-même.

Le contre-interrogatoire de l’état-major de la SQ n’est pas terminé. Il se poursuivra mercredi après-midi. Mardi, la Commission d’enquête sur la protection de la confidentialité des sources journalistiques entendra le directeur du Service de police de la Ville de Montréal, Philippe Pichet.

Lia Lévesque, La Presse canadienne

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