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Dans l’enfer dès 15 ans – Se libérer de la drogue et de la prostitution

Pour Marie, qui habite dans l’arrondissement Les Rivières, chaque jour est une victoire. (Photo Métro Média – Alain Couillard) Photo:

TÉMOIGNAGE. Prostituée à 15 ans, voleuse pour assurer sa consommation de cocaïne et conductrice pour des escortes, Marie (prénom fictif) a aussi vécu un an dans la rue et flirté avec le côté sombre de la vie pendant six ans. En 2016, elle quitte la prostitution et parvient à ne plus consommer, deux étapes qui lui ont donné ce qu’elle avait perdu depuis longtemps : l’estime de soi.

«Il y a moyen de s’en sortir. Ce qui m’a aidé c’est de me trouver une personne de confiance et de réaliser qu’elle croyait en moi. Je n’aurais pas misé cinq cennes sur ma réussite. Je me disais que je ne valais rien et je marchais la tête entre les deux jambes.» Elle avoue que la première année d’abstinence, en 2016, a été très difficile. «J’ai vécu toutes les montagnes russes d’émotions. Lorsque tu consommes, ça t’enlève tous tes problèmes, mais dans le fond, ils s’accumulent. Quand tu débuzzes, tu fais le saut.»

«Je ne voulais pas retourner là-dedans et j’ai pété une coche. Ce fut le début de la fin pour moi. J’ai arrêté de consommer en 2016 et je me suis retrouvée dans la rue pendant un an.»
-Marie

Le Projet intervention prostitution Québec offre une présence significative et un accompagnement personnalisé pour les personnes qui sont actives ou d’exploitation sexuelle (Photo Métro Média – Alain Couillard)

Marie souligne qu’elle avait déjà la moitié d’un cheminement de fait lorsqu’elle s’est installée à Québec en 2016. «Il faut dire que la dernière journée où j’étais dans ma ville, ma chum s’est fait violer devant moi et je ne pouvais rien faire, car si j’intervenais on me tuait. À un moment donné, tu te demandes si vivre là-dedans en vaut vraiment la peine?» Une fois dans la capitale, elle trouve une maison d’hébergement lui permettant de se reposer de 17h à 9h le lendemain. «Le reste du temps, on nous envoyait dehors même en hiver. J’avais un travailleur de rue que j’appelais pratiquement tous les jours.»

Plusieurs mois plus tard, elle parvient à se trouver un loyer subventionné et elle s’inscrit aux narcotiques anonymes. «Ça aide beaucoup, car c’est comme une microsociété. Par contre, si tu manques une réunion, on présume que tu as recommencé à consommer ce qui n’était pas mon cas. C’est là que j’ai décidé de venir au Projet intervention prostitution Québec (PIPQ). Au moins, je parlais avec des personnes qui s’en sont sorties.»

Le point d’origine

«J’ai travaillé sur moi pour trouver le bobo qui était l’incapacité de faire du sport comme je voulais en faire. En huit ans, je n’en avais jamais parlé à personne.» Marie raconte qu’à 14 ans, une blessure sportive l’a contrainte à abandonner son rêve. «Je jouais dans l’élite et là, mon médecin m’a appris que si je me reblessais, il se pouvait que je me retrouve en fauteuil roulant. Après ça, je me suis mise à consommer et à boire pour essayer de ne plus y penser. Lorsque j’étais plus jeune, ma punition c’était de me dire que je ne pouvais pas aller jouer dehors.»

La prostitution est un phénomène présent autant dans les grandes villes que dans les régions du Québec (Photo iStockPhoto)

Des problèmes de comportement s’ajoutent. «J’étais si agressive à 17 ans que mes parents m’ont placée dans un centre jeunesse jusqu’à 18 ans. C’est là que j’ai connu du monde qui était dans le crime organisé. En sortant de là, c’est ma meilleure amie qui m’a présenté à eux.» Elle devient aussi conductrice pour des escortes pendant trois ou quatre ans. «Là, je consommais encore plus de coke. C’était parfois du travail 23 heures sur 24. Le petit Redbull ne faisait pas effet.»

En parler

Depuis deux ans, Marie sillonne le Québec et donne des conférences dans des établissements soclaires afin de sensibiliser les jeunes aux dangers de la prostitution. «La direction me dit souvent qu’il n’y en a pas ce genre de problème dans l’école. Moi, je n’avais personne pour me prévenir de ce qui allait m’arriver.» Selon le PIPQ, les premiers gestes de prostitution se produisent très jeunes. On parle de 14 ans chez les filles et à 11 ou 12 ans chez les gars. Il faut travailler sur des facteurs de protection.

Marie déplore la fermeture des centres de thérapie. «On oublie que les jeunes d’aujourd’hui seront les adultes de demain. C’est la relève et il faut en prendre soin. Les politiciens vont peut-être se réveiller un jour.»

Infos – pipq.org

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