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Une maison d’accueil pour les travailleuses du sexe

Depuis sept ans, le projet LUNE travaille sur la mise en place d’un hébergement pour les travailleuses du sexe. Les membres de ce projet espèrent pouvoir ouvrir cette maison d’ici quelques mois.

«À Québec, il y a un manque de services pour accueillir les travailleuses du sexe et les itinérantes lorsqu’elles sont notamment sous l’emprise de la drogue», explique Amélie Bédard, responsable du projet LUNE. Pour pallier ce vide, elle espère ouvrir d’ici quelques mois un centre d’hébergement de courte durée pour ces femmes, souvent sans domicile fixe et consommatrices de drogue, afin de les protéger lorsqu’elles sont vulnérables.

«Elles ont des besoins de base comme se laver, se nourrir, être écoutées, dormir en paix et en sécurité», poursuit-elle.

La maison accueillera sans préjugés les femmes. «Il existe des organismes à Québec. Nous, nous prendrons le relais pour la nuit», rajoute Joe-Anny, la doyenne du groupe.

Offrir un moment de répit

Au début, la maison sera ouverte uniquement la nuit. Elle disposera de 6 lits pour offrir un moment de répit aux travailleuses du sexe et aux itinérantes, une salle commune, une petite cuisine et des commodités. «Ce n’est pas normal qu’en 2013, une femme dorme dehors, c’est inacceptable. Il se s’agit pas d’être des magiciens mais nous offrirons un service de dernière chance aux femmes qui auront été refusées dans d’autres centres d’hébergement», poursuit-elle.

L’organisme a récemment reçu une subvention de 90 000 $, octroyée par la Conférence régionale des élus de la Capitale-Nationale, pour la mise en place d’un projet pilote de six mois. Il louera un espace dans les quartiers centraux, Saint-Roch ou Saint-Sauveur, «pour que les filles puissent s’y rendre à pied. Le choix du lieu n’est pas encore arrêté car nous souhaitons travailler à démystifier les préjugés et le syndrome du pas dans ma cour», explique la responsable.

Le projet LUNE redonne espoir

Le projet LUNE, pour Libres Unies Nuancées Ensemble, a vu le jour en 2007 dans le cadre d’un projet de recherche-action, réalisé par l’Université Laval. Pour mettre sur pied ce projet plusieurs filles du milieu, comme Joe-Anny qui exerce encore le plus vieux métier du monde, ont été approchées. En effet, ce projet est réalisé par et pour les filles qui ont connu ou connaissent encore la drogue et le travail du sexe. «Dans la rue, nous sommes à risque. Cette maison serait un lieu d’échange et de partage. En 2013, nous vivons dans une société bien hypocrite. On est jugées mais s’il y a des travailleuses du sexe, c’est parce qu’il y a des clients», tient-elle à rappeler.

«Dès le début, nous avons été impliquées dans ce projet, c’est valorisant. Quand tu es sur l’aide sociale et que tu quêtes, tu es jugée. Avec ce projet, j’ai vu autre chose que la drogue et la prostitution. Graduellement j’ai arrêté même si j’ai de petites rechutes. J’avais pris un break dans mon implication mais je suis revenue il y a cinq mois et ça change ma vie», confie Maya.

À l’instar de Maya, Chantal a aussi connu la drogue et la prostitution. «Un quart de poudre m’a coûté ma vie, mon couple, mes enfants, ma maison. Ici, c’est le seul endroit où je peux dire ce que j’ai fait. Avec mon dossier criminel, jamais je n’aurai pensé retravailler avec les chiffres, on m’a redonné une chance», confie cette comptable de métier qui vient de réussir son examen et assure dorénavant la comptabilité du projet LUNE.

Juli B. arpente, quant à elle, les rues de Québec et vient en aide aux filles, à titre de paire-aidante. «Je les suis depuis quatre ans, et tranquillement la confiance s’installe. Je peux leur parler car je sais ce qu’elles vivent, j’ai été dans leur situation. Si tu veux, tu peux t’en sortir. Une des filles, par exemple, ne se pique plus depuis un an. Graduellement, elles changent et à force de s’intéresser à elles, elles vont pouvoir s’en sortir», raconte-t-elle.

À terme, l’organisme espère augmenter le nombre de lits et allonger la plage horaire afin d’accueillir en tout temps les femmes.

L’organisme à but non lucratif, qui est hébergé dans les locaux du Projet intervention prostitution Québec, travaille sur ce projet avec de nombreux partenaires : Maison Revivre, PECH, Maison Marie-Frédéric, Centre Jacques-Cartier, YWCA, CSSS de la Vieille-Capitale, Regroupement pour l’Aide aux ItinérantEs de Québec, Ville de Québec, Service de Police de Québec.

Le projet LUNE en chiffres

2007 : naissance du projet LUNE

2014: année où les membres du projet espère ouvrir une maison d’hébergement de courte durée destinée aux travailleuses du sexe et aux itinérantes

10: la maison sera ouverte la nuit, pendant dix heures, 6 jours sur 7

6: nombre de lits que disposera le centre d’hébergement

6 : le projet-pilote sera mis en place pour six mois. À terme, l’organisme espère poursuivre son activité et permettre un accueil à l’année, 24 h/24 et 7 jours/7.

Le Québec Express, membre du Groupe Québec Hebdo

Joe-Anny: Amélie Bédard, responsable; Chantal, Juli B. et Maya sont les membres du projet LUNE, qui  vu le jour en 2007. Pour le mettre sur pied plusieurs filles qui exercent ou ont exercé le plus vieux métier du monde, ont été approchées.

(Photo Isabelle Le Maléfan)

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