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Écrire l’amour et la mort, la poésie hybride de Laurence Caron-Castonguay

Laurence Caron-Castonguay lie art et questionnement identitaire. Photo: (Photo Métro Média - Perrine Gruson)

POÉSIE. Premier recueil de poésie de l’artiste multidisciplinaire de Limoilou Laurence Caron-Castonguay, La mort habite ici se voulait initialement une forme de correspondance avec l’être aimé. Bien que l’artiste ait côtoyé le monde du slam auparavant, c’est sa pratique des arts visuels et du dessin qui rend son recueil si imagé.

Laurence Caron-Castonguay l’annonce d’emblée, il faut l’appeler «une personne» plutôt que l’enfermer dans un genre. Malgré une famille bien ouverte et tissée serrée, l’artiste a longtemps souffert de ne pas se reconnaître dans les modèles traditionnels de la société. Né dans un corps d’homme, iel [il s’agit d’un néologisme pour désigner les personnes non binaires] a cherché longtemps à comprendre son identité de genre et sexuelle. «J’ai cru à un moment que j’étais un homme gay. Mais non, je ne me sentais pas homme», explique-t-iel.

Son parcours artistique est hors de l’ordinaire. Après un diplôme d’études collégiales, un baccalauréat en arts visuels, une maîtrise en enseignement collégial, le flamboyant personnage a travaillé dans tous les domaines. Enseignant.e [orthographe inclusive pour les personnes non binaires] au cégep de Rimouski et dans le Grand Nord, iel a travaillé dans certains comités de soutien en politique, a même travaillé en infographie pour une entreprise de presse et aide au quotidien en tant qu’intervenant.e social.e les jeunes trans ou en questionnement d’identité de genre en basse-ville de Québec. «Il y en a qui ont besoin d’une opération et c’est correct», explique le queer qui les aide à cheminer en s’aidant de sa pratique artistique.

Artiste libre

«J’ai adoré écrire. Mais c’est moins naturel pour moi que de dessiner, ça me demande plus de travail. […] Je suis né.e avec un crayon dans les mains». L’ouvrage de poésie est une première dans la carrière de l’artiste qui vient du monde des arts visuels.

Au départ, les poèmes faisaient partie d’une correspondance entre Laurence et son mari, pendant qu’iel enseignait dans le Grand Nord et que Sébastien restait à Québec, un cadeau qu’ils s’étaient promis de tenir. Laurence écrirait et Sébastien illustrerait. «Chaque poème est un peu le résumé de ma journée».

Pourquoi ce titre, La mort habite ici? «J’ai vu et vécu quatre morts quand j’étais dans le Grand nord. Là-bas, ils ont un rapport très différent au deuil. […] Je me suis rendu.e compte que je ne voulais pas pleurer les morts mais bien célébrer les vivants», explique Laurence. Toujours, l’artiste est dans la création, partout, tout le temps. «Je crée mes propres morceaux de linge. […] Je fais aussi partie du Cercle de fermières de Vanier où j’apprends les arts traditionnels, le tissage, la couture», mentionne la jeune recrue. L’artiste qui vit au jour le jour continuera à monter des dossiers pour des expositions et aimerait écrire un 2e recueil de poésie.

Questionnement identitaire

Jusqu’à 25 ans, Laurence s’est questionné.e sur ce qu’iel était. «Je n’étais pas bien dans ma peau. Je faisais de l’autosélection naturelle. Je m’autodétruisais», confie Laurence qui est passé.e par la drogue et l’alcool dans ses plus sombres années. C’est après un atelier sur le genre à l’âge de 25 ans qu’iel a eu le déclic, n’a plus eu besoin de se questionner sans cesse et a pu s’épanouir.

L’artiste conçoit sa vie comme une performance à visée politique. «J’en donne plus que le client demande, s’amuse-t-iel. Je joue sur l’image de moi, l’image qu’on perçoit de moi, l’image que je projette. Si un jour j’ai le goût de m’habiller en dude, je le fais. Si une autre fois, je veux me maquiller, je le fais aussi».

Et s’il n’a personne pour le voir dans toute sa journée, comment se sent l’artiste, comment préfère-t-iel s’habiller? «C’est quand je suis nu, sans grille normée, que je suis le moins dysphorique».

Comment répondre à un enfant qui se questionne?

Lorsque récemment, une petite fille a questionné son père au sujet Laurence et son «déguisement» au Salon du livre, son papa l’a amenée près de l’artiste pour qu’elle pose sa question. «Je ne suis pas déguisé.e, a-t-iel répondu. Ce sont mes vêtements. Je m’habille comme ça pour que toi plus tard, tu choisisses de t’habiller comme tu le souhaites, sans qu’on t’impose quoi que ce soit». La petite fille lui a souri, satisfaite de la réponse.

 

 

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