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L’art de cultiver l’émerveillement chez les enfants

Catherine L’Écuyer fait figure de sommité inter­nationale dans le domaine de l’éducation grâce à ses livres et ses conférences. (Photo gracieuseté) Photo:

LITTÉRATURE. À l’ère du numérique et du divertissement permanent, rarement les moyens artificiels n’ont été autant utilisés pour motiver les enfants. Pourtant, jamais ils n’ont été aussi démotivés et inattentifs. Tel est le constat de l’auteure et conférencière Catherine L’Écuyer, qui prend le parti de l’émerveillement comme besoin fondamental et inné à replacer au coeur de l’éducation.

Originaire de Québec désormais installée en Espagne, mais néanmoins résidente estivale de Sillery, la détentrice d’un doctorat en éducation et psychologie, elle-même mère de quatre enfants, expose sa théorie dans son plus récent livre. Tiré à plus de 100 000 exemplaires dans 60 pays, il est traduit en français sous le titre Cultiver l’émerveillement – Comment préserver la soif d’apprendre de nos enfants. Préfacée par le Dr Jean-François Chicoine, la version québécoise s’adresse aux parents, aux enseignants et à tous ceux qui interviennent dans les ser­vices éducatifs.

Cultiver l’émerveillement (Educar en el asombro; dans sa version originale espagnole) a été traduit en huit langues et publié dans 60 pays, en 100 000 exemplaires. (Photo gracieuseté)

L’ouvrage secoue les idées reçues, au moment où le Québec instaure la maternelle à quatre ans, alors que la pression monte pour prolonger les services de garde et que les écrans servent autant à instruire qu’à divertir. L’auteure y souligne les risques de la «surstimulation», des milieux contaminés par les bruits et les écrans, des attentes trop élevées que trahissent une scolarisation précoce et des journées surchargées.

De l’avis de Catherine L’Écuyer, la quiétude, la lenteur et l’instant présent s’avèrent inhérents à l’enfance. Plutôt que de le pousser tôt à performer, mieux vaut respecter le rythme de l’enfant et favoriser son inclination à l’émerveillement. Voici pourquoi:

Question: Existe-t-il un lien entre émerveillement et apprentissage?

Réponse: «Aristote disait que «tous les humains ont, par nature, le désir de savoir». Ce désir, c’est l’émerveillement. Des milliers d’années plus tard, nous nous inquiétons parce que nos enfants ne sont pas motivés. Nous cherchons des réponses à l’absence de motivation dans des solutions à la remorque de causes externes (châtiments, récompenses, stimuli technos, obsession des bonnes notes, etc.), alors que la motivation vraie et durable devrait, du moins dans l’enfance, prendre sa source dans la capacité d’émerveillement.»

Question: À l’ère de la facilité du numérique, comment stimuler le désir d’apprendre?

Réponse: «Le désir d’apprendre ne se stimule pas, il est inné chez l’enfant. À l’étape préscolaire, il suffit de lui donner un environnement propice à son bon développement. Cet environnement doit avoir un sens pour lui et respecter les lois naturelles de l’enfance: ses rythmes et cadences, ses étapes, sa soif de rituels, de mystère et de beauté, etc.»

Question: Y a-t-il un risque, à trop bien faire, de suréduquer et surstimuler les jeunes?

Réponse: «Les stimuli technologiques en bas âge peuvent supplanter leur sens inné de l’étonnement, étouffer leur capacité à se motiver par eux-mêmes. Offrir

Originaire de Québec, l’auteure y fera escale le vendredi 20 septembre dans le cadre d’une tournée internationale de conférences. (Photo gracieuseté)

un substitut de cause à leur élan, c’est annuler leur volonté. Ultimement, ces enfants développeront une dépendance aux stimuli externes, devenant autrement incapables de ressentir quoi que ce soit, leur avide désir d’apprendre étant alors réprimé. Dans certains cas, leur dépendance à la surstimulation peut les pousser dans une quête de sensations toujours plus fortes, auxquelles ils deviendront également accoutumés. C’est ce qui les conduira finalement à un état d’apathie soutenue, à un manque d’enthousiasme, à l’inattention, à l’ennui. C’est ce que je décris comme «le cercle vicieux de la surstimulation» dans mon livre.»

Question: Est-ce possible de retrouver l’émerveillement même blasé par la vie des adultes?

Réponse: «Tout à fait. Les personnes les plus émerveillées, avec les enfants, seront toujours leurs grands-parents. Le passage du temps permet de discerner ce qui est essentiel et ce qui ne l’est pas. À l’âge adulte, on s’émerveille lorsqu’on abandonne le p’tit bonheur fugace du rythme effréné, de la surconsommation matérielle et digitale et lorsqu’on se rend compte qu’il n’existe pas de droit au bonheur. Le bonheur dont on tente de s’approprier ou qu’on tient pour acquis nous échappera toujours. S’émerveiller, c’est justement ne rien tenir pour acquis, c’est concevoir chaque jour comme un cadeau. D’ailleurs, le principal fruit de l’émerveillement est la reconnaissance.»

Le livre Cultiver l’émerveillement est vendu en librairie depuis le 17 septembre. L’auteure Catherine L’Écuyer animera une conférence, ce vendredi 20 septembre, à 19h30, au Montmartre (salle Saint-Augustin). Contribution volontaire. Information: catherinelecuyer-fr.com

Québec Hebdo

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