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Un passé à vendre

FERME URBAINE. Une partie des terres agricoles de la famille Lortie sur la rue du Vignoble est à vendre. Une décision rendue nécessaire par la hausse faramineuse de taxes municipales imposée en 2013, dont le montant est passé de 3000 à 11 000$. Si la vente de cette parcelle sud devrait permettre, pour un temps, d’absorber les coûts, quel sort attend l’ensemble du domaine à plus long terme, alors que les fermes en milieu urbain peinent à maintenir la tête hors de l’eau?

Armand Lortie a hérité de la ferme maraîchère de son père qui, lui-même, l’avait reprise à son père. L’été, ses 12 enfants avaient l’habitude de participer aux tâches agricoles. «Les vacances commençaient quand l’école commençait», se rappelle l’une des filles aînées, Claudette, qui se souvient aussi des longues journées de labeur qui pouvaient s’étirer jusqu’à 21h. «Chez nous, on avait comme devise « Travaille pis dors, dors pis travaille, mais dors pas en travaillant »», lance en riant l’enseignante à la retraite.

Une visite des bâtiments agricoles réveille chez elle des histoires de jeunesse. L’avantage de cette vie à labourer, dira-t-elle par ailleurs, c’est qu’ils n’ont jamais manqué de nourriture à la maison. Mais le métier de fermier doit composer avec bien des insécurités. La récolte allait-elle être bonne? Arrivera-t-on à la vendre? Des questions qui se posaient invariablement chaque année, jusqu’à ce qu’Armand Lortie cesse ses activités, il y a environ 10 ans, à l’âge de 85 ans.

Un présent actif

La terre n’a pas moins continué d’être cultivée; aujourd’hui, elle est utilisée par deux neveux de M. Lortie qui poursuivent à petite échelle la tradition agricole familiale, par des amateurs de jardinage qui louent des rangs, et par le jardin collectif de la Tomate joyeuse. Pour l’heure, la parcelle en vente amputera une partie du lot des neveux, mais l’avenir incertain du reste du domaine aux limites de Charlesbourg et Beauport fait craindre le pire chez les membres de la Tomate joyeuse.

«Présentement, elle [la terre] fait le bonheur de beaucoup de monde», observe Claudette Lortie. Aussi aurait-elle souhaité que les choses se poursuivent ainsi, que la terre familiale conserve dans une certaine mesure une vocation agricole vieille de trois siècles. «On voit disparaître quelque chose qui, pour nous, était là de toute éternité», anticipe-t-elle avec regret, déplorant au passage l’inaction de la Ville de Québec dans le dossier des fermes urbaines.

Un futur incertain

Certes, elle est on ne peut plus consciente de l’ampleur de la tâche pour qui voudrait reprendre le flambeau. «Ça prend quelqu’un qui a les reins solides. Il faut qu’il l’exploite assez [la terre] pour être rentable», estime Mme Lortie. Mais, alors que «tout ce qui semble se dessiner à l’horizon, c’est le pic des démolisseurs», elle juge que d’autres scénarios pourraient être envisagés afin de sauvegarder au moins en partie cet héritage agricole.

Pour elle, il ne s’agit pas seulement de conserver un pan d’histoire mais, surtout, d’investir dans l’avenir, dans une alimentation de proximité qui répond aux besoins de la population et au principe d’autonomie alimentaire.

Scénarios envisagés

-Aménager un marché public à côté de l’espace réservé à l’agriculture

-Transformer les bâtiments agricoles en lieux culturels

Membre du Groupe Québec Hebdo

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