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Le policier Simon Beaulieu acquitté sur toute la ligne

TRIBUNAL. Affichant une mine toujours aussi impassible, le policier de Québec Simon Beaulieu est néanmoins ressorti soulagé du palais de justice de Québec, vendredi matin. Il a été acquitté des accusations de négligence criminelle et de conduite dangereuse ayant causé la mort du cycliste Guy Blouin, lors d’une interception qui a mal tourné dans le quartier Saint-Roch le 3 septembre 2014.

Simon Beaulieu et son avocat Maxime Roy ont témoigné brièvement de leur soulagement.

(Photo TC Media – François Cattapan)

Après analyse du dossier ayant fait l’objet de reconstitutions par des experts des deux parties, le juge René De la Sablonnière arrive à un verdict d’acquittement complet faute de preuves suffisantes pour démontrer hors de tout doute la faute de l’accusé.

Dans un long jugement écrit, le magistrat a déclaré que «le Tribunal n’a pas été convaincu pleinement de la preuve de conduite dangereuse. Il conclut également qu’en l’absence de preuve pour cette faute moindre, il ne peut être convaincu de l’accusation la plus grave de négligence criminelle causant la mort.»

Rappelons que le drame est survenu lors d’une interception policière sur la rue Saint-François, à la suite de plaintes de vols de bicyclettes. Le policier Beaulieu voyant arriver Guy Blouin à vélo, il lui demande d’arrêter. Devant son refus d’obtempérer et l’agent fait brusquement marche arrière et percute le cycliste, qui se retrouve sous le véhicule.

Aussitôt, les deux policiers portent assistance au blessé et le sortent de sa fâcheuse position. Agité, M. Blouin demande aux agents de le laisser tranquille et va jusqu’à leur présenter un doigt d’honneur lorsqu’il monte dans l’ambulance. Son état de santé s’est ensuite rapidement dégradé au point de nécessité des manœuvres de réanimation. Peu de temps après son arrivée à l’hôpital les médecins constatent son décès dû aux séquelles internes subies à la suite d’un écrasement thoracique.

Décision appuyée

L’intérêt du public pour connaître la décision du Tribunal dans ce dossier a obligé l’ouverture d’une seconde salle d’audience.

(Photo TC Media – François Cattapan)

Le juge a appuyé sa décision sur l’appréciation des faits et éléments de preuve qui lui ont été présentés. Il a indiqué que les experts de la Défense ont été plus convaincants, au point de soulever un doute sur la formule de calcul de la vitesse réelle du véhicule en marche arrière. La Cour a donc retenu que celui-ci se déplaçait à 22km/h et non à plus de 40km/h comme le prétendait la Couronne.

De plus, considérant l’analyse plus solide de l’expert de la Défense, elle a pris en considération dans son jugement la démonstration que le véhicule conduit par le policier Beaulieu avait un problème d’essieux arrière. Pareille défectuosité a pu nuire au bon fonctionnement du système de freinage ABS.

«La Défense a soulevé un doute raisonnable avec des explications plus étoffées et convaincantes», a observé le juge De la Sablonnière en précisant qu’il devait analyser la négligence dans la conduite par rapport à la norme pour un policier effectuant une intervention dans des circonstances similaires.

«En l’occurrence, a-t-il ajouté, l’écart de la faute se devait d’être suffisamment marqué pour mériter d’être puni. Or, cela n’a pas été démontré. Il s’agit donc d’un malheureux et bête accident, dont l’accusé ne peut être tenu responsable.»

 

Réactions

Le porte-parole du Comité du 3 septembre, Jean Fortin, reste dubitatif devant la longueur et la lourdeur de la procédure judiciaire.

(Photo TC Media – François Cattapan)

Les membres du Comité du 3 septembre, créé en soutien à Guy Blouin, ont quitté la salle d’audience en silence, non sans afficher un air incrédule. «Je suis abasourdi par le jugement, mais je respecte la décision du juge même si celle-ci ne me surprend pas. Je demeure sceptique quant aux arguments sur la basse vitesse atteinte par le véhicule avant l’impact», a indiqué Jean Fortin, porte-parole du regroupement populaire, selon qui le délai de 40 mois pour l’aboutissement du dossier s’avère trop long et difficile autant pour les proches de Guy Blouin que pour ceux de Simon Beaulieu.

Le procureur de la Couronne, Me Michael Bourget, n’entend pas interjeter appel du jugement sur les faits.

(Photo TC Media – François Cattapan)

De son côté, le procureur Me Michael Bourget, originaire du Saguenay pour préserver l’indépendance de la Couronne dans cette cause, a pris acte de la décision de la Cour. Rejetant la faiblesse de la preuve experte présentée par la Poursuite, il considère que «le juge a tranché après avoir fait le tour des éléments qui lui ont été présentés. L’analyse après de longues procédures a permis de rendre justice», a-t-il commenté en ajoutant ne pas avoir l’intention d’interjeter appel du jugement rendu sur les faits.

Enfin, le policier Simon Beaulieu s’est présenté devant les médias en contenant ses émotions, accompagné de son avocat Me Maxime Roy. Ce dernier a émis un court commentaire au nom de son client, disant que «la décision du Tribunal était bien accueillie et qu’elle confirme qu’il s’agissait d’un malheureux accident.»

Par ailleurs, la direction du Service de police de la Ville de Québec (SPVQ) a émis un communiqué dans lequel elle réitère «ses sympathies envers la famille et les proches de la victime dans cette affaire». À la suite de l’acquittement de son agent, le corps de police précise que le dossier de Simon Beaulieu sera prochainement analysé en déontologie.

TC Media

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