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Plainte de profilage racial en appel contre deux policiers de Québec

TRIBUNAL. La Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse du Québec (CDPDJQ) vient d’obtenir la permission d’appeler d’un jugement du Tribunal des droits de la personne, dans un dossier de plainte pour profilage racial portée contre deux policiers de Québec. La cause qui remonte à plus de huit ans a déjà connu plusieurs rebondissements devant d’autres instances administratives.

Justice

Depositphotos.com – Vladru

Ce nouvel appel a été obtenu dans un dossier où la CDPDJQ dénonçait l’existence d’une discrimination sous forme de profilage racial impliquant deux agents du Service de police de la Ville de Québec (SPVQ). De l’avis de la Commission, le juge du Tribunal a conclu à l’absence de profilage en omettant de tenir compte du contexte social et en refusant d’analyser l’intervention elle-même, pour déterminer si elle comportait des biais discriminatoires.

«La Commission souhaite que les interventions policières soient analysées en considérant le contexte, afin de déterminer s’il y a eu discrimination par profilage racial, a déclaré Me Tamara Thermitus, présidente de la CDPDJQ. En effet, le profilage racial prend assise sur des préjugés et stéréotypes, souvent inconscients, que seul le contexte pourrait démontrer. C’est donc d’un point de vue systémique que nous désirons intervenir.»

Selon Me Thermitus, la question soulevée par le litige aura un impact important pour les personnes qui portent plainte pour profilage racial, puisque les principes qui y seront développés s’appliqueront de manière générale à tous les litiges de même nature. À cet effet, la Commission représente actuellement des victimes dans 10 dossiers de cas soupçonnés de profilage racial devant les tribunaux de la province.

Rappel des faits

Les événements à la source de ce litige sont survenus tôt le matin du 26 août 2008 (vers 3h30). Il s’agit d’une intervention des agents Alexandre Pageau et Sébastien Tessier. Les patrouilleurs du SPVQ interceptent la voiture de Fritz-Gérald Dumont parce que sa passagère, Éloïse Villeneuve, ne porte pas sa ceinture de sécurité.

L’intervention devient rapidement problématique. Devant le refus de collaborer de Mme Villeneuve, l’agent Tessier décide de l’arrêter à des fins d’identification. Pendant cette intervention, M. Dumont aurait agi, aux yeux de l’agent Pageau, d’une façon telle qu’il a dû le mettre en état d’arrestation pour intimidation et saisir son téléphone cellulaire. Des propos discutables auraient été tenus par les agents, la même nuit au poste de police, lorsque M. Dumont et ses passagères sont venus déposer des plaintes contre eux.

Ces plaintes sont jugées recevables et le 15 septembre 2009 le Commissaire à la déontologie policière dépose des citations contre les deux agents. Toutefois, dans une décision du 2 mai 2011, les plaintes sont rejetées. De plus, par un jugement du 17 juillet 2012, le juge de la Cour du Québec François Godbout rejette l’appel de la décision. Par ailleurs, M. Dumont a été accusé d’entrave puis d’intimidation. Il y aura finalement retrait de la première plainte et acquittement faute de preuve pour la seconde.

Jugement antérieur

Devant le Tribunal des droits de la personne, la CDPDJQ a allégué que les agents du SPVQ Sébastien Tessier et Alexandre Pageau ont eu, dans l’exercice de leurs fonctions et alors qu’ils étaient en position d’autorité, un comportement discriminatoire par profilage racial envers Fritz-Gérald Dumont. Ils ont ainsi porté atteinte à son droit à la sauvegarde de sa dignité, sans distinction ou exclusion fondée sur la couleur, contrairement aux articles 4 et 10 de la Charte des droits et libertés de la personne.

La Commission demandait au Tribunal de condamner les agents, solidairement avec la Ville de Québec, à verser à M. Dumont 20 000$ à titre de dommages-intérêts moraux. Elle suggérait aussi de condamner chacun des agents à verser 3000$ et la Ville de Québec 5000$ à titre de dommages-intérêts punitifs. Elle réclamait aussi une ordonnance pour que le service de police adopte un plan stratégique sur le profilage racial.

De leur côté, les Défendeurs niaient avoir commis l’atteinte alléguée. De plus, leurs avocats ont fait valoir que puisque les dommages réclamés ne sont pas relatifs à une blessure corporelle, la prescription applicable serait celle de six mois en vertu de la Loi sur les cités et villes. La réclamation serait donc prescrite.

Or, le Tribunal conclut, après avoir soupesé la crédibilité des témoins, que la CDPDJQ n’a pas rencontré le fardeau de preuve qui était le sien. Il estime que les agents Tessier et Pageau n’ont pas eu un comportement qui constitue du profilage racial. En conséquence, dans une décision rendue le 31 octobre 2016, le juge Scott Hughes du Tribunal des droits de la personne a rejeté la demande de la Commission. C’est ce jugement qui fait l’objet d’une permission d’appel.

TC Media

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