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Eau contaminée à Shannon : nouvelle preuve autorisée

TRIBUNAL. La Cour d’appel autorise la requête en dépôt de nouveaux éléments de preuve au dossier de l’eau contaminée à Shannon. La démarche survient alors que la cause a été portée en appel par les citoyens, après un jugement favorable, mais estimé trop peu généreux en matière d’indemnisation.

Les trois juges François Pelletier, Lorne Giroux et Nicholas Kasirer ont entendu les parties, mardi, au palais de justice de Québec. Leur décision permet à la requérante de présenter trois nouveaux éléments de preuve au dossier. Il s’agit de trois rapports d’experts qui sont tous postérieurs aux audiences de première instance. Le premier porte sur les conclusions dissidentes d’un médecin de la Direction de la santé publique (DSP), le second émane de la DSP et le dernier émane d’un comité-conseil.

De l’avis du juge Pelletier, président de l’audience en appel, «le contenu de ces trois rapports paraît utile à l’éclairage de la présente cause. Il y a tout lieu de présumer qu’il ouvre la porte à un débat important dans cette affaire». Celle-ci traîne en longueur depuis le début des procédures en 2011. Toutefois, la contamination au trichloréthylène (TCE) de l’eau souterraine de Shannon est antérieure aux débuts des années 2000, moment où elle a été officiellement constatée et dénoncée.

Chacun des auteurs de ces trois rapports pourra être appelé à témoigner et à être contre-interrogé. Par ailleurs, la partie intimée aura également le loisir de présenter un nouveau rapport de contre-expertise d’ici avril prochain. Peu enthousiaste en raison des délais additionnels que cela implique, le juge Pelletier a néanmoins accepté de suspendre la cause présentement en appel.

Le dossier du recours en dédommagement des citoyens de Shannon touchés par l’eau contaminée au TCE reviendra donc devant un juge de la Cour supérieure pour complément de preuve. Cette réouverture exceptionnelle de dossier devra toutefois être complétée d’ici au 30 juin 2017. Afin de s’assurer de respecter les échéanciers serrés, une conférence de gestion devra être fixée à la première date disponible.

Arguments divergents

Dans l’argumentaire étayant sa requête, l’avocat des citoyens de Shannon, Me Charles A. Veilleux, a insisté sur le fait qu’à l’époque de l’audition en première instance, il n’y avait pas d’étude épidémiologique disponible. Or, à son avis, une étude de cas réalisée en janvier 2016 tend à démontrer un risque anormalement élevé des incidences de cancer à Shannon.

Sa requête s’appuie sur le concept de risque relatif et prévoit la présentation de trois éléments qui amènent un éclairage complètement nouveau. Il s’agit de trois rapports d’experts desquels ressortent des données statistiquement significatives pour la cause des requérants. S’il obtient une décision favorable, Me Veilleux espère le renvoi de la cause devant la Cour supérieure et la suspension du processus d’appel en attendant les compléments de preuve.

De son côté, l’avocat des intimés représentant le Procureur du Canada, Me David Lucas, a présenté une série de jurisprudences concernant semblable requête en dépôt de nouvelle preuve. Il a rappelé que l’évidence doit être plausible, ce qui ne serait pas le cas ici. Ce point de vue sera au cœur du débat lors des prochaines audiences.

Selon lui, le juge de la première instance avait déjà fait le constat que l’analyse des données était affectée par des distorsions qui persistent toujours. Le lien causal ne serait pas démontré, surtout en l’absence de comparaison avec une population de plus grande taille et en fonction des profils d’âge.

Soulagement

Les principaux porte-parole de la cause des citoyens de Shannon, Marie-Paule Spieser et Jean Bernier n’ont pas caché leur soulagement au sortir de la salle de cour. Pour eux, il était clair que les juges ne pouvaient faire autrement que d’autoriser leur requête pour faire connaître des faits, et surtout, des données qui n’étaient pas admissibles en première instance.

«Nous continuons de travailler pour que le maximum de résidents de Shannon soient défendus et dédommagés. Le temps presse parce qu’il y a des gens qui sont malades et d’autres qui meurent pendant que les procédures s’éternisent. Ça fait exactement 17 ans qu’on vit avec la hantise de cette contamination toxique. Et, même si la majorité des propriétés ont été raccordées à un aqueduc, la source du problème est toujours dans le sol», expliquent-ils.

Rappelons qu’un premier jugement favorable avait accordé un dédommagement de 1000$ par mois pendant 15 ans à quelque 300 résidents situés dans le triangle rouge de la contamination au TCE. Toutefois, le regroupement des citoyens a décidé de poursuite la lutte pour faire reconnaître près de 3000 victimes. La demande initiale de compensation s’élevait à 200M$.

Québec Hebdo

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