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Condamnation pour meurtre: même issue pour deux parcours de vie bien différents

Cinquième projet pilote du genre, le palais de justice de Québec sera mieux aménagé et plus sécurisant pour les victimes de violences sexuelles. Photo: Métro Média - Archives

TRIBUNAL. Le palais de justice de Québec est parfois le théâtre de drames humains qui présentent certaines similitudes, mais qui débouchent sur des réalités très différentes. Deux causes de meurtre jugées dans deux salles distinctes ont donné lieu à des moments de douleur et de peine, dont les origines sont diamétralement opposées.

Dans les deux cas, les gestes irréparables ont conduit à des condamnations de détention à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle avant 12 ans pour meurtre non prémédité. Toutefois, les similitudes s’arrêtent là dans la trame factuelle des dossiers de Yan Dugas et de Pierre Gagné-Boily, qui ont connu leur dénouement judiciaire mardi matin.

Vengeance d’un jeune abusé

C’est le 7 octobre 2016 que la vie de Yan Dugas a pris un tournant fatidique. Voulant mettre un terme à ses souffrances, il s’en est pris à un présumé pédophile qui l’aurait déjà abusé sexuellement. Muni d’un couteau, il est monté dans l’appartement de Mathias Breton 73 ans, au coin de la 2e Rue et de la 8e Avenue, et l’a poignardé à mort. Or, le triste récit de son parcours de vie démontre que la source de son mal-être était beaucoup plus profondément enfouie dans le passé de son enfance.

Tout jeune, Yan Dugas a été diagnostiqué d’un sévère trouble de déficit de l’attention avec hyperactivité (TDAH). Petit et frêle, il fait l’objet d’intimidation et de harcèlement dès l’école primaire. Apparaissent alors des difficultés académiques et le début d’un cheminement chaotique. La violence devient son mécanisme de défense et il finit par se faire expulser des classes. S’ensuivent des séjours entrecoupés de fuites en centre de jeunesse et en familles d’accueil.

À l’âge de 14 ans, il fait la connaissance d’adultes en qui il investit le peu de confiance qui lui reste. Il en sera hélas amèrement déçu lorsque ces relations espérées signifiantes dévieront vers de la consommation d’alcool et de drogues, pour favoriser des contacts sexuels. Il en garde de profondes séquelles et se réfugie dans la délinquance. Dépendant aux drogues dures, il subit de multiples agressions sexuelles de la part d’hommes présents dans son entourage malsain. Désirant sortir de cette spirale, le jeune homme à peine rendu à 18 ans s’est attaqué violemment à l’un de ses présumés abuseurs.

Pour ajouter au caractère glauque de ce drame humain, la victime était connue comme un «orphelin de Duplessis», sans famille. C’est-à-dire, que Mathias Breton a fait partie de ces enfants illégitimes (nés hors mariage) ou abandonnés entre 1930 et 1960. Ils ont été placés dans des institutions québécoises comme les crèches, les orphelinats et les hôpitaux psychiatriques. Comme la plupart d’entre eux, il a subi des abus physiques et sexuels, pour ensuite répéter le comportement déviant dans son entourage. Le septuagénaire cumulait d’ailleurs des antécédents judiciaires en la matière.

Excès fatal de jalousie

Le cas de Pierre Gagné-Boily se trouve à l’opposée du spectre de la spirale sociale qui mène à poser des actes criminels. En couple depuis 13 ans avec Marie-Lisa Desbiens, ils vivent à l’aise, ont de bons emplois et viennent de s’installer dans la région de Québec afin de progresser dans leur carrière respective. Tout bascule subitement pour eux et leurs proches le 28 août 2017, lorsque la conjointe admet avoir rencontré un autre homme et envisage la séparation.

Connu pour son tempérament jaloux et possessif, Gagné-Boily perd la carte dans un excès de colère. Il empoigne un couteau de cuisine et en assène de multiples coups à la femme de 30 ans, qu’il abandonne ensanglantée dans la chambre conjugale. Il ira se dénoncer à sa soeur, avant d’aller se livrer à la police. L’examen médicolégal confirmera que plusieurs des blessures infligées étaient potentiellement mortelles.

Deux ans et demi plus tard, l’accusé est toujours hanté par ses gestes aussi inexplicables qu’inexcusables. Il se dit profondément attristé par le mal qu’il a fait à «sa conjointe extraordinaire qu’il ne méritait pas et à sa belle-famille qu’il aimait». L’homme âgé de 36 ans sait trop bien qu’il ne peut revenir en arrière ni offrir sa vie en échange de celle qu’il a enlevée. Il ne peut que demander pardon à des gens, qui n’ont que faire de ses remords tant la douleur liée à la perte de l’être cher reste toujours vive.

La lettre lue par une tante de la défunte illustre à quel point les séquelles d’un crime ont des répercussions sur toute une famille. «Intelligente et enjouée, Marie-Lisa était promise à un brillant avenir. Elle était une fille, une nièce, une sœur et une tante cool très appréciée. Amoureuse des animaux, elle envisageait de reprendre la ferme familiale. La perte de celle qui devait habiter la maison ancestrale crée un vide énorme dans la vie de tous, à l’image de la demeure laissée à l’abandon.» Un témoignage déchirant que l’accusé a écouté en pleurant avant de reconnaître qu’il aura suffi de quelques secondes d’impulsivité incontrôlée «pour tout scrapper et faire tant de mal à tout son entourage».

Québec Hebdo

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