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Quelque part entre l’art et la chimie

À première vue, l’artisane-émailleure Diane Charuest semble revêtir les airs d’un chimiste des siècles derniers, avec son petit four, ses cristaux métalliques et ses petites plaquettes de cuivre. Mais lorsqu’entrent en jeu les couleurs pailletées et les illustrations, le spectateur de cette démonstration n’a d’autre choix que de se rendre à l’évidence : l’émaillerie, bien que cousine de la chimie, demeure un art entier.

L’émaillerie fait vie commune avec l’artisane limouloise depuis une trentaine d’années. D’aussi loin qu’elle se souvienne, Diane Charuest a toujours voué une passion sans borne pour cet art aujourd’hui en voie d’extinction. «La toute première fois que je suis entrée en contact avec l’émaillerie, j’étais à l’école secondaire, relate la principale intéressée. J’étais alors très impressionnée par cette technique. Quand j’ai terminé mon secondaire, j’ai pris la décision de suivre une formation de deux ans avec Fernande Belleau. Elle m’a montré tout ce qu’elle connaissait de la technique.»

Dès lors, l’artisane plonge tête première dans cet art, au risque de commettre certaines erreurs. Car l’émaillerie est d’abord et avant tout une technique d’expérimentations. Expérimentations des couleurs, du temps de cuisson de la poudre de verre et des formes font partie du quotidien des artisans-émailleurs.
«Je suis chanceuse parce que je vends de mes œuvres, ce qui me permet de faire beaucoup plus de recherche. Je peux ainsi travailler la finesse des détails.» La Limouloise s’est fixé pour objectif de créer deux nouvelles collections chaque année. Depuis près de cinq ans cependant, elle se consacre à un sujet qu’elle adore exploiter : les oiseaux québécois. «Les oiseaux, c’est mon dada!, souligne-t-elle un sourire en coin. Je veux faire connaître les différentes espèces d’oiseaux de la province. Car ils sont une richesse du Québec, les oiseaux.»

Un travail de moine

La technique de l’émaillerie, bien qu’en apparence fort simple, cache son lot de difficultés. Outre détenir un budget considérable pour se procurer les matériaux de base, l’artisan doit constamment faire preuve de minutie et de doigté. Les erreurs sont difficilement réparables.

La plaquette de cuivre, comparable à la toile pour un peintre, est disponible dans une panoplie de dimensions, question de répondre aux besoins de l’artiste. D’abord nettoyée avec précaution, elle est par la suite recouverte d’une couche de poudre de verre. L’artisan s’empresse alors de porter l’ébauche de son œuvre dans le four préalablement chauffé à 1 000 degrés Fahrenheit. Lorsque prête, la pièce est libérée de sa prison de chaleur accablante et déposée délicatement sur le comptoir, le temps que le tout refroidisse. L’étape peut être répétée autant de fois que l’artiste le désire, en fonction de la complexité de l’œuvre.

Avant que la pièce ne se retrouve entre les mains d’un acheteur cependant, quelques étapes de finitions sont requises. Après quoi l’artiste peut disposer de son œuvre tel qu’il le souhaite.

Contrairement à d’autres métaux ou types d’œuvres d’art, qui peuvent ternir ou perdre de l’éclat au fil du temps, il n’en est rien pour les émaux sur cuivre. «Après de nombreuses années, la pièce ne change pas de couleur, assure l’artisane. L’émail a une durée de vie très longue.»

Un métier en perte de popularité

Bien que l’émaillerie soit exercée depuis des millénaires, ils se font rares, les artisans-émailleurs. Au dire de Diane Charuest, ils ne seraient plus que trois ou quatre dans la région. C’est donc dire que le métier est littéralement en voie d’extinction. «Les matériaux sont très dispendieux, argue l’artisane. Cette hausse considérable du coût d’achat des matériaux de base, telles la poudre de verre et les plaquettes de cuivre, a éliminé beaucoup de gens pour qui cet art n’était qu’un simple passe-temps.»

Cette perte de vitesse du métier inquiète tout particulièrement Mme Charuest, qui envisage sérieusement de transmettre ses connaissances à la jeune génération. «C’est dans mes projets d’initier les plus jeunes à la technique, pour que je puisse penser que d’autres pourront prendre la relève.»

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