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Tuerie de Québec: la peine d’Alexandre Bissonnette maintenue à 25 ans

Alexandre Bissonnette, auteur de la tuerie à la mosquée de Québec, avec une agente de sécurité du palais de justice de Québec lors d'une comparution en février 2017.
Alexandre Bisonnette au palais de justice de Québec en février 2017. Photo: Mathieu Belanger/La Presse canadienne

Alexandre Bissonnette, auteur de la tuerie à la mosquée de Québec en janvier 2017, devra purger 25 ans de prison sans possibilité de libération conditionnelle, statue la Cour suprême du Canada. Le cumul des peines dans cette affaire est jugé inconstitutionnel.

La poursuite demandait que Bissonnette purge 25 ans de façon cumulative pour chacun des six meurtres commis à la mosquée de Québec. Il aurait ainsi passé le reste de ses jours derrière les barreaux.

Alexandre Bissonnette a plaidé coupable à l’ensemble des chefs d’accusation portés contre lui en mars 2018. La Couronne réclamait des peines consécutives alors que la défense estimait que des peines concurrentes menant à un maximum de 25 ans sans libération conditionnelle seraient plus appropriées.

Le juge de première instance avait coupé la poire en deux avec une peine de 40 ans sans possibilité de libération conditionnelle. Ce jugement inusité a été cassé par la Cour d’appel du Québec en novembre 2020. Vendredi, la Cour suprême du Canada a maintenu la décision de la Cour d’appel, jugeant invalide les dispositions du Code criminel qui permettaient les peines consécutives dans un dossier de meurtres multiples au premier degré.

«L’article 745.51 permet l’infliction de peines d’emprisonnement qui, dans les faits, privent tous les contrevenants visés d’une possibilité réaliste d’obtenir une libération conditionnelle avant leur décès. De telles peines sont de nature dégradante, et donc contraires à la dignité humaine, puisqu’elles retirent aux contrevenants toute possibilité de réinsertion sociale», écrit le juge en chef Richard Wagner.

Le tueur condamné pour un ou plusieurs meurtres demeure condamné à la perpétuité pour ses gestes. C’est la possibilité de faire une demande de libération conditionnelle qui reste envisageable après un minimum de 25 ans de détention, comme le prescrit le Code pénal. Cette libération n’est pas automatique. Le détenu doit démontrer une bonne conduite et un potentiel de réhabilitation. De plus, les autorités vont évaluer le niveau de risque pour la société et sa confiance en la justice. Enfin, le cas échéant, il y aura d’importantes conditions à respecter sous haute surveillance. Et, s’il y a infraction aux conditions imposées, le prévenu retourne purger sa peine de pénitencier à vie.

Vives réactions

Sans aborder le bien-fondé de la décision, le Conseil national des musulmans canadiens (CNMC) a souligné l’impact que la décision de la Cour suprême dans le dossier d’Alexandre Bissonnette pourrait avoir sur les communautés musulmanes du Québec et du Canada dans un communiqué émis vendredi.

La douleur, la souffrance et l’angoisse [qu’Alexandre Bissonnette] a causées avec son plan calculé de meurtre de masse ne seront jamais complètement éteintes pour ceux dont il a détruit la vie à Québec et au-delà. La communauté de la ville de Québec ne parviendra probablement jamais à surmonter complètement sa perte, surtout si l’on sait que la cause de sa douleur pourrait revenir vivre parmi elle dans 20 ans.

Lina El Bakir, responssable des affaires publiques au Québec au sein du Conseil national des musulmans canadiens.

Alexandre Boulerice, chef adjoint du Nouveau Parti démocratique et député de Rosemont, a aussi souligné l’impact sur la communauté, sans remettre en question le jugement.

«La fusillade de la mosquée de Québec est l’un des moments les plus tristes de l’histoire de notre pays. Six personnes ont été tuées et 19 autres ont été blessées. Ces individus ont été ciblés et tués simplement parce qu’ils étaient musulmans. La communauté musulmane est encore sous le choc de cette horrible attaque et le jugement de la Cour suprême d’aujourd’hui doit être très difficile à entendre pour eux», a-t-il dit.

Le Parti conservateur du Canada, qui avait mis en place les dispositions invalidées, n’a pas tardé à marquer sa désapprobation vis-à-vis la Cour suprême.

«La décision rendue aujourd’hui par la Cour suprême du Canada est extrêmement décevante et ne défend pas les droits des victimes. Cette décision signifie que des meurtriers de masse comme Alexandre Bissonnette, un homme qui a assassiné sans raison six personnes dans leur lieu de culte, peuvent être libres de circuler dans les rues», a dit le porte-parole du parti en matière de Justice, Pierre Paul-Hus.

Le gouvernement respectera la décision

Le ministre fédéral de la Justice, David Lametti, a diffusé la réaction gouvernementale sur Twitter. Le gouvernement Trudeau respectera la décision de la Cour suprême et évaluera «attentivement les implications et la voie à suivre».

«Notre position était claire: nous avons reconnu le pouvoir discrétionnaire du juge d’imposer une période d’inadmissibilité plus longue, le cas échéant», souligne le ministre.

https://twitter.com/DavidLametti/status/1530258053358051329

Répercussions sur le système pénal

Étant rétroactive, la décision de la Cour suprême dans le dossier d’Alexandre Bissonnette aura des répercussions sur tout le système pénal canadien. Elle s’applique aux autres détenus condamnés à des peines consécutives pour des meurtres multiples. C’est le cas notamment pour Justin Bourque, reconnu coupable du meurtre de trois policiers, en 2014, à Moncton au Nouveau-Brunswick. La peine de détention à vie qu’il purge sans possibilité de libération conditionnelle avant 75 ans sera ramenée à 25 ans.

Mentionnons également qu’il y aura un impact sur le dossier du meurtrier au sabre qui a fauché deux vies et blessé cinq autres personnes le soir de l’Halloween 2020 dans le Vieux-Québec. Après que le jury ait reconnu la responsabilité criminelle de Carl Girouard, le juge Richard Grenier a mentionné qu’il tiendrait compte de la décision de la Cour suprême dans l’affaire du tireur de la mosquée dans la détermination de la peine.

Avec la collaboration de François Cattapan.

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