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Le point sur la situation des demandeurs d’asile à la frontière

IMMIGRATION. L’arrivée de milliers de gens à la frontière entre le Québec et les États-Unis depuis le début de l’été, des personnes qui se retrouvent ensuite dans des camps de l’armée, frappe l’imagination. Beaucoup de choses ont été dites et écrites mais il peut être difficile de s’y retrouver.

Des chapiteaus blancs ont été aménagés à Saint-Bernard-de-Lacolle, le temps que les dossiers des demandeurs d’asile soient traités.

(Photo TC Medias – Archives Josianne Desjardins)

Voici un résumé de cette situation hors de l’ordinaire.

D’où viennent-ils?

Environ 85% de ces gens entrés de façon irrégulière à la frontière sud du Québec dans les dernières semaines sont d’origine haïtienne, en provenance des États-Unis. D’autres sont des ressortissants du Soudan et de la Turquie, notamment.

Pourquoi viennent-ils au Canada, s’ils étaient déjà en sécurité aux États-Unis?

Il est prévu que la majorité de ces gens feront une demande d’asile. Le nombre de demandes déposées à ce jour n’est toutefois pas encore connu. Parmi ceux qui viennent d’entrer irrégulièrement à la frontière, se trouvent bon nombre d’Haïtiens ayant vécu aux États-Unis depuis quelques années, en vertu d’un statut de protection temporaire accordé après le terrible tremblement de terre de 2010 qui a dévasté Haïti. Leur statut vient à échéance d’ici quelques mois et ils craignent de ne pas avoir l’autorisation de rester aux États-Unis. Plusieurs ont reçu des lettres du gouvernement américain les avisant de se préparer à rentrer en Haïti.

De plus, les autorités craignent que certains soient venus après avoir cru de fausses informations qui circuleraient sur les médias sociaux, laissant entendre que le Canada les invite à demander l’asile, a indiqué jeudi en point de presse Louis Dumas, directeur régional du réseau national du ministère de l’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada. Mais il ne s’agit pas d’un message gouvernemental, a-t-il précisé.

Pourquoi entrent-ils de façon irrégulière, sans passer par un poste-frontière?

Parce que s’ils se présentent à un poste-frontière et font une demande d’asile, ils seront automatiquement refoulés, sauf de rares exceptions. C’est le cas en raison d’un accord conclu entre le Canada et les États-Unis: l’Entente sur les tiers pays sûrs. Celle-ci prévoit que les demandeurs d’asile doivent présenter leur demande dans le premier pays sûr où ils mettent les pieds après avoir quitté leur pays d’origine. Dans le cas présent, il s’agirait, pour bon nombre d’entre eux, des États-Unis. Ces demandeurs d’asile potentiels traversent donc par des chemins sans douanes ou par la forêt. Une fois arrêtés en sol canadien par la GRC qui patrouille les environs, ils peuvent demander la protection du Canada.

Combien sont-ils?

Plus de 8000 sont entrés irrégulièrement depuis le début du mois de juin. Seulement depuis le 1er août, plus de 3800 personnes ont été interceptées au Canada, après avoir traversé à pied la frontière de façon irrégulière, soit sans passer par un poste-frontière. Les autorités en ont compté 781 en juin et 2996 en juillet. Environ 250 personnes par jour sont actuellement interceptées, a confirmé la Gendarmerie royale du Canada (GRC).

Vont-ils tous rester au Canada?

Ceux qui démontrent qu’ils sont des réfugiés au sens des conventions internationales, bref, qu’ils ont fui leur pays pour éviter la guerre, la persécution ou la terreur, auront de bonnes chances de rester. L’ONU définit le réfugié comme une personne qui craint avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de ses opinions politiques, de sa nationalité ou de son appartenance à un groupe social en particulier, est-il rapporté sur le site d’Immigration Canada.

Ceux qui veulent venir au Canada pour y trouver du travail, améliorer leurs conditions de vie et aider leurs proches restés dans leur pays d’origine où sévit la famine et le chômage, risquent fort de ne pas remplir les critères de la loi canadienne. Des exceptions sont toutefois possibles. À titre indicatif, 50 pour cent des ressortissants d’Haïti qui ont formulé une demande d’asile en 2016 ont été refusés.

(On distingue donc ces récents arrivants en sol canadien de ceux qui ont formulé une demande depuis leur pays pour immigrer et travailler au Canada, qui sont évalués selon une série de critères complètement différents de ceux qui font une demande d’asile).

Que vont-ils devenir?

Ceux dont la demande d’asile sera refusée peuvent ensuite en appeler de cette décision. Si le refus est maintenu, des procédures de renvoi dans leur pays d’origine seront entamées et ils devront alors quitter le Canada.

Combien cela peut-il prendre de temps?

Actuellement, le délai de traitement d’une demande est d’environ un an, et de deux ans si un processus d’appel de la décision est entamé, a expliqué un avocat spécialisé en immigration, Stéphane Handfield. Il est toutefois possible que le gouvernement, qui a déjà ajouté des employés supplémentaires pour étudier les demandes, accélère la cadence du traitement des dossiers. 

Où habitent-ils?

Ils demeurent au moment de leur arrivée au pays dans des camps installés par l’armée, avec la présence de la Croix-Rouge, près du poste-frontière de Saint-Bernard-de-Lacolle. Il s’agit d’un endroit temporaire, juste le temps nécessaire à l’Agence des services frontaliers du Canada de faire les premières vérifications d’identité et de sécurité. Ils y restent de deux à quatre jours — délai en date de jeudi —puis ils sont transférés dans un centre d’hébergement temporaire à Montréal (notamment au Stade olympique et dans un YMCA) et dans un hôtel à Cornwall, en Ontario. Lorsqu’ils recevront leur premier chèque d’aide sociale, ils pourront s’installer dans un logement plus permanent.

Y-a-t-il des criminels qui entrent au pays et s’y promènent librement?

Non, affirment les autorités canadiennes. Toutes les personnes entrées irrégulièrement à la frontière ont été évaluées par les autorités qui scrutent notamment des banques de données nationales et internationales pour voir si elles se retrouvent sur des registres en matière d’immigration, de criminalité et de terrorisme.

Certaines ont été placées en détention dès leur arrivée, mais il s’agit de moins d’un pour cent des personnes interceptées lors de cette vague estivale. Elles ont été arrêtées et emprisonnées pour des motifs de criminalité ou pour avoir commis des infractions, a-t-il été indiqué par les autorités lors d’un point de presse tenu jeudi matin à Lacolle.

(Stéphanie Marin, La Presse canadienne)

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